Le secret
Je crois qu’il est temps de parler de toi, du souvenir que j’ai conservé de toi.
Je crois qu’il est temps de sourire, aussi, à cette photo de classe où je me tenais bien droite, assise, les mains posées sur les genoux, sage, une frange épaisse couvrant mon front. J’avais le sourire timide à l’époque, rempli de fossettes, des yeux immenses, naïfs et doux.
Et toi, là, un peu plus à gauche, avec ton regard malicieux, tes airs de garnement et tes cheveux en bataille, tu étais,sans le savoir,mon plus grand secret.
Je t’aimais, comme on ne peut aimer qu’à neuf ans, en te laissant croire que je te méprisais, que je ne te voyais pas.
Et tu demeurais, à chaque seconde, ma préoccupation absolue.
Mes battements de cœur auraient du faiblir, avec le temps…
Alors, il est temps de parler du temps, justement, qui n’efface rien. Pauvre sagesse populaire !
Il est temps de parler du cœur, aussi, qui se meurt, et puis qui repart, toujours.
Mon coeur s’est arrêté, pour la première fois, à l’aube de mes seize ans, lorsque je t’ai vu embrasser cette fille brune, aux cheveux courts.
Il est temps de te dire…je t’aimais.
Tu ne l’as jamais su.