Les invités de l'île, Vonne Van der Meer
Résumé : Située sur une île, au large des côtes hollandaises, une maison nommée Duinroos (Rose des vents) accueille chaque année de nouveaux occupants, du mois de Mars à la fin de septembre. Les vacanciers se succèdent et leurs histoires, individuelles, défilent : un couple tente de réparer son amour, une jeune fille et une femme plus mûre confrontent leur désir de maternité, un veuf reprend goût à la vie, une famille évite le pire et trouve le meilleur, un couple se forme en en séparant un autre, une femme convalescente renoue avec elle-même et ses souvenirs... Près d'eux, une femme de ménage, une gardienne, les surveille, les bichonne, en secret, puis referme la porte, après leur passage, et ramène les coquillages sur la plage.
Avis d'Antigone : Ce roman est très agréable à lire, et a presque un air de recueil de nouvelles car à chaque passage, à chaque location, nous suivons des personnages différents, des histoires uniques. Les seuls liens entre ces habitants provisoires sont cette maison charmante, et un peu démodée, une maison de vacances, et l'ange gardien de ces lieux, cette femme de ménage qui jette un oeil sur la maison, comme sur un bien précieux, remet les objets et le livre d'or en place, puis s'efface . J'ai aimé lire ce doux roman qui laisse un goût délicieux de sel, de sable et de vent, un goût d'été presque hors saison.
Extrait (début du roman) : "Il est grand temps que je termine. S'ils ont pris le bateau de midi, ils peuvent être ici dans une demi-heure. Ca m'est arrivé une fois : en nage, contente de mon travail, je ferme la maison, glisse la clef sous le paillasson et les découvre là, plantés à côté d'une carriole de plage où trônent bagages et enfants, au bord du sentier de coquillages. La déception sur leurs visages. Depuis, je sais que je dois demeurer invisible. S'ils me croisent ici, la maison ne sera plus autant la leur, et s'ils ne s'approprient pas la maison, ils ne vont pas passer un bon séjour. Même s'ils savent qu'ils ne la louent que pour une semaine, deux semaines, voire même un mois, ils doivent pouvoir se figurer qu'elle est à eux. Si c'était moi la locataire, cela irait tout seul. De toutes les maisons où j'ai fait le ménage, Duinroos est celle que je préfère. Torenzicht, Kiekendief, Jojanneke et d'Instuif, je m'en suis débarassée au fil des années. De belles maisons, je ne dis pas, où l'on a posé du carrelage et du lino, bien plus faciles d'entretien que Duinroos, mais ça faisait trop, il a fallu que je choisisse."
Le bel article de Papillon
J'ai noté cette lecture chez Bellesahi et en plus, chouette, il y a une suite !!
Errance
Là où je vais
Là où je suis
Que des pas
Dans le désert
La sueur
De la terre
En poussière
La solitude
Là où j’avance
Aucun bruit
Poussée hors de votre jardin
A tout jamais
Condamnée
Pour des gestes faits
Des amours partagées
Des presque riens
Là où je marche
Qui d’autre me suivra
Qui le voudra
Et le doute
Toujours
D’avoir le droit de crier
La rage
Là où je m’allonge
Du sable
Dur
Amer
Mon corps blessé
Anéanti
Se relever
Après ça
Loin de votre jardin
Exister
Orpheline
De votre bénédiction
Avoir la chance
Un jour
De devenir
Moi
Ailleurs
PERSEPOLIS
L'histoire : A Téhéran, en 1978, Marjane, huit ans, se rêve en prophète sauvant le monde. Choyée par des parents modernes et cultivés, très liée à sa grand-mère, elle suit avec exaltation les évènements qui remuent les adultes de sa famille, qui vont mener le pays à la révolution et provoquer la chute du régime du Chah.
Avec l'instauration de la République islamique débute le temps des "commissaires de la révolution" qui contrôlent tenues et comportements. Marjane qui doit porter le voile, se rêve désormais en révolutionnaire. Bientôt, la guerre contre l'Irak entraîne bombardements, privations, et disparitions de proches. La répression intérieure devient chaque jour plus sévère. Dans un contexte de plus en plus pénible, sa langue bien pendue et ses positions rebelles deviennent problématiques. Ses parents décident alors de l'envoyer en Autriche pour la protéger...
Avis d'Antigone : Je l'ai enfin vu, ce film d'animation, tiré de la BD du même nom, dont j'ai tant entendu parler. Et bien, je n'ai pas été déçue, malgré cette utilisation constante du noir et blanc, et ce thème de guerre qui ne m'inspire guère, en règle générale. Ce film est de toute beauté, tantôt grave et lourd, tantôt léger et drôle, souvent étonnant et instructif. J'ai appris beaucoup de points d'histoire que je ne connaissais pas et ai été surprise par l'extraordinaire soif de vivre de ces gens, pourtant enfermés dans un régime ultra rigoriste, mais qui risquent leur vie pour une cassette ou une fête. On ressort de cette histoire avec un appétit de vivre renouvelé. Le personnage de la grand-mère m'a particulièrement touché ! A voir, sans hésiter !
Un extrait :
Persepolis (Extrait 3)
envoyé par J00J002007
Bel Gazou l'a vu aussi, et m'a donné envie d'emprunter ce DVD !!
L'article de Sylvie sur la BD, et le film.
L'avis de Gachucha sur la BD (vous y trouverez plein d'autres liens vers d'autres avis).
La répudiée, Eliette Abécassis
Résumé (extrait de la quatrième de couverture) : "Au premier regard, Rachel a aimé Nathan, le mari qu'on lui destinait. Et c'est avec bonheur qu'elle a accepté son destin de femme pieuse dans ce quartier traditionaliste de méa Shéarim, à Jérusalem, où elle a grandi. Mais au fil des années se dessine le drame qui la brisera : le couple n'a pas d'enfant. Et la loi hassidique donne au mari, au bout de dix ans, la possibilité de répudier la femme stérile."
Avis d'Antigone : Déjà, et avant tout, je trouve la couverture de la version poche magnifique (détail de Eve ou l'amour en blanc, Sandorfi) ! Et puis, bien sûr, il y a cette histoire, belle et bouleversante. Ce n'est pourtant pas le roman d'Eliette Abecassis que je préfère. Un style peut-être trop simple, à mon goût, mais ce style est également la voix de cette femme, pudique et pieuse, qui exprime, sans pathos, ses sentiments, alors il devient cohérent et évident, à la lecture. Enfin, il y a ce thème, très fort, celui des lois religieuses, ces lois humaines, si inhumaines, dictées au nom de Dieu, et qui tuent... Alors, il n'y a plus rien à dire, ce roman devient un témoignage universel, et je ne peux qu'être touchée.
Extrait : "Tous les mois, c'est la même chose. Je pleure. Je soupire. J'attends. Que le linge au-dessous de moi ne soit point taché de rouge. Et tous les mois, mon ventre me fait mal. Le sang s'échappe, je saigne, je prie, je pleure. Mes larmes mouillent le mur occidental. Telle une brebis abandonnée, ainsi j'erre dans les rues. Mes paupières tremblent, mes jambes vacillent, mes yeux brillent de douleur. Je regarde autour de moi, je ne vois personne pour m'aider.
Ma mère, qui est la gardienne du mikvé, le bain rituel, a honte de ma stérilité. Chaque mois, je viens me tremper dans l'eau de pluie car, à la fin des sept jours sans tache, la femme doit s'immerger dans le mikvé à la nuit tombée, après que trois étoiles ont été visibles.
Il me semble que j'expie quelque chose. Je souffre, je vomis, je me traîne par terre, je cogne ma tête contre les murs. Toute la journée, je reste couchée. Nathan a trouvé un nom pour les jours impurs. Il me demande quand sera finie "ma maladie". Il n'a pas pas tort. L'impureté mensuelle, c'est la maladie de la femme stérile.
Mais on ne peut devenir pure que parce que l'on est impure. C'est pourquoi la femme, chaque mois, s'élève en se purifiant. Quand tout est fini, je me rends au bain rituel, je me déshabille, et, aidée par ma mère Hanna, je plonge dans le bassin d'eau froide, tête comprise : c'est une naissance.
- Toujours rien ? demande ma mère.
- Toujours rien.
- Cela va bientôt faire dix ans.
- Je sais. S'il le veut, Nathan peut me répudier."
La lecture d'Anne (qui suit le même chemin de lecture que moi...)
Les autres titres lus du même auteur : Un heureux évènement et Clandestin.
Le plus beau jour
S'il pouvait faire un temps à mettre un chien dehors
Si je pouvais avoir un coeur à fendre pierre
Si l'amour devenait plus lâche que la mort
Si nous étions des morts pour parler de la vie
Si nous étions heureux pour ne plus rien nous dire
Si nous étions vivants pour pouvoir nous aimer
Si le monde n'était pas fait pour le refaire
Si tu n'existais pas pour pouvoir t'inventer.
JEAN MALRIEU (1915-1977) Préface à l'Amour "Les Cahiers du Sud", 1953
Départ
Voici un texte écrit sous l'impulsion de la consigne 61 du site Paroles Plurielles.
Il fallait s'inspirer de la photo ci-dessous et de l'incipit suivant : "J'ai bien fait le tour de la question".
J’ai bien fait le tour de la question, mais rapidement, très rapidement. J’ai tourné trois fois les mots dans ma bouche avant que de les dire ; ils sont sortis tout seuls, sans efforts.
« Non, c’est moi qui pars ».
Il n’a pas fait un geste. Il est resté prostré dans son fauteuil, encore étourdi sans doute, par l’ampleur de sa propre déclaration matinale : « Je ne t’aime plus, Rosa, je veux partir. Nous perdons notre temps ensemble. »
J’ai réfléchi ensuite, longuement, toute la journée, au bureau, tout en classant des papiers, en répondant au téléphone, sur l’énormité de ce que j’avais dit, sur tout ce que cela impliquait. Il me devait bien ce temps de réflexion, cette porte fermée, ou plutôt claquée, silencieuse, qui avait ponctué ma phrase et clos la conversation.
Il me devait bien la peur.
J’ai pris tout mon temps pour rentrer, le retrouver dans cet appartement immense où chacun avait fait son nid petit à petit, inconsciemment, l’un à côté de l’autre, sans se toucher. J’ai pris tout mon temps pour lui redire, « C’est moi qui pars. ».
Je ne me doutais pas que ce serait si simple, que je tenais à si peu de choses.
Je ne me doutais pas qu’un jour, aujourd’hui, il me suffirait de pousser des battants de volets en bois, pour respirer et sentir sous mes paumes les battements de cœur de l’été. Je ne me doutais pas que ma vie avait encore tellement de possibles, inexploités.
Laurence Tardieu
"J'ai remplacé la possibilité de l'amour par la possibilité de l'écriture.
J'ai peur, aussi, mais c'est une autre peur : je sais que l'écriture ne m'abandonnera pas. J'ai même l'espoir fou qu'elle me comble.
Qu'elle comble des vides. Qu'elle comble l'enfance."
Extrait de Rêve d'amour de Laurence Tardieu
Et non, je n'ai pas encore lu ce livre, mais j'ai extraite cette phrase d'un article lu aujourd'hui [ici], qui m'a donné très envie de le lire.
Mal de pierres, Milena Agus
Résumé : Au centre de cette histoire, une héroïne, une jeune Sarde étrange "aux longs cheveux noirs et aux yeux immenses". Célibataire à 30 ans, elle est déjà vieille fille lorsqu'un prétendant un peu plus motivé que les autres parvient à obtenir sa main. Un homme d'autant plus méritant que sa nouvelle épouse est atteinte du «mal de pierres»: des calculs rénaux qui lui interdiraient l'expérience de la maternité. Autour d'elle, donc, plusieurs personnages : son mari, épousé par raison, pour le plus grand bonheur de ses parents, soulagés de cette fille fantasque et rêveuse, un peu folle ; son amant, nommé le "Rescapé", idéal masculin rencontré lors d'une cure et jamais oublié ; ce fils inespéré, seule grossesse qu'elle tiendra jusqu'à son terme ; et cette petite-fille, narratrice du roman, la seule qui permettra à l'héroïne de révéler sa vérité par ce récit plein de tendresse.
Avis d'Antigone : Je me suis un peu ennuyée à la lecture de ce roman. J'aurais aimé, sans doute, plus de rebondissements, de fulgurance, et je suis restée sur ma faim... Malgré tout, il y a de très belles choses dans ce livre, des pudeurs, et des impudeurs, des non-dits, et des hypocrisies, des allers et retours entre aujourd'hui et hier, une belle photographie d'un pan de l'Italie que je ne connaissais pas. Alors ? Je vous l'avoue, je suis passée un peu à côté de ce livre là.
Extrait : "Cette maison n'est pas restée vide, d'autant que nous venons ici, mon fiancé et moi, je pense toujours qu'elle garde l'énergie de grand-mère et que si nous faisons l'amour dans un lit de la rue Manno, dans cet endroit magique où l'on n'entend que la rumeur du port et le cri des mouettes, nous nous aimerons toujours. Car au fond, en amour, il s'agit peut-être au bout du compte de se fier à la magie, on ne peut pas dire qu'on puisse trouver une règle, quelque chose à suivre, pour que tout se passe bien, par exemple obéir à des commandements.
Et au lieu de faire le ménage, de lire les nouvelles sur la situation en Irak avec ces Américains dont on ne comprend pas s'ils sont une armée de libération ou d'occupation, j'ai écrit, sur le cahier que j'ai toujours sur moi, le récit de grand-mère, du Rescapé, de son père, de sa femme, de sa fille, de grand-père, de mes parents, des voisines de la rue Sulis, de mes grands-tantes paternelles et maternelles, de ma grand-mère Lila, de mesdemoiselles Doloretta et Fanni, de la musique, de Cagliari, de Gênes, de Milan, de Gavoi."
Les avis de Sylire, d'Anne et de Bellesahi (trois avis que je partage) ;
d'Arlette, de Sylvie, de Clarabel et de Cuné (quatre avis plus élogieux).