American Express, James Salter
"Gloria ne pouvait admettre que Truus, maintenant plus mince, était invitée à des soirées, s'asseyait dans l'éclat de restaurants bondés avec son teint toujours aussi laid sous son maquillage et sa morale de mouche. L'idée qu'il pût y avoir un bonheur immérité auquel certaines personnes pouvaient accéder la rendait presque malade."
James Salter est pour moi personae incognita. J'ai choisi ce livre barriolé exclusivement pour l'attrait de sa couverture et sa référence vague - en résumé - d'une ressemblance éventuelle avec l'univers de Nabokov (après lecture, rien n'est certain, une certaine mise en lumière de la dépravation peut-être).
Ici, se cotoient onze nouvelles, onze univers parfois glauques, souvent confus, de temps en temps opressants qui donnent de l'humanité une image un peu désespérante et froide. Je n'ai jamais eu auparavant une telle sensation, qu'un être humain pouvait être un ou un autre peu importe, qu'il pouvait être interchangeable, un produit consommable. J'ai aimé la nouvelle Autres rivages (titre emprunté sans doute à un des beaux romans russes de Nabokov) qui met en scène une baby sitter, son amoureux sulfureux, un petit garçon tendre et sa mère dépassée. Les autres nouvelles sont une déception. Quelle dommage ! Malgré une très belle écriture et des fulgurances de phrases, magnifiques, le tout ne m'a pas semblé une découverte à la hauteur de mes espérances.
Pour remettre les choses à leur place, James Salter a tout de même reçu pour ce titre le Prix Pen Faulkner en 1988.