Guy Goffette
"Réveil en musique : il pleut. Rester couché surtout : écrire n'est plus de mise quand la pluie sur le toit chante sans effort, et son vers est impair et passe en sautillant. [...] Ce qu'il dit importe peu : c'est l'âme des choses qu'on croyait en allée pour toujours et qui revient, remplit les creux. On s'en rend compte dès que la pluie a tourné au coin de la rue, pas besoin d'ouvrir les yeux. Le silence n'est plus l'absence de bruits, mais la voix soudain en nous, accordée, complice, de la vie et de l'être. Le temps ne passe plus. Et la terre est enfin bleue comme une orange. Les poètes ont toujours raison."
"Au fond, les vrais voyages sont immobiles. Immobiles et infinis. Solitaires. Silencieux. Souvent, ils commencent dans une chambre où l'on est enfermé parce qu'il pleut ou parce qu'on est malade, obligé de garder le lit. On a huit ou neuf ans, le goût des images qui partent toutes seules dans tous les sens et qu'on lit de même, en sautant par dessus les fuseaux horaires, uniquement préoccupé du cours qu'elles ouvrent en nous et attentif au fleuve qui va venir, qui doit venir, gonflé qu'il est de toute l'eau du regard, de la pluie qui tombe peut-être dans ce monde tout près où l'on n'est plus ; gonflé, oui, et irisé par la fièvre douce (encore et peut-être) qui nous saoule un peu et nous fait dériver entre les motifs du papier peint décoloré."
"Demain, le jardin du monde va refleurir, qui rend ses couleurs aux plus vieilles images, toute sa lumière à celui qui, regardant, voit plus loin que ses yeux et met la mer en bouteille en marchant dans un livre."
... quelques extrait de Les derniers planteurs de fumée (Folio2€). Merci Cathulu !!
Et un auteur qui a pris tout de suite à mon oreille ce ton familier qui fait les belles découvertes. A suivre.