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Les lectures d'Antigone ...

Ardoise magique

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Ben oui, à mon tour, j'ai craqué !

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24 novembre 2007

Jeux d'enfants

Tchac ! Tchac !

En garde !

Tchac ! Tchac !

Tremblez, sacripants ! Vous ne pourrez m’échapper !

Tchac ! Tchac !

Je suis corsaire, mais femme, aux seins bandés. Je suis chef de bande. Ma petite troupe me suit, médusée. Mon épée imaginaire, brandie dans les airs, est vraiment impressionnante.

Tchac ! Tchac !

Les deux garçons, plus jeunes que moi, promus, bien malgré eux, ennemis à combattre, se cachent en riant.

Tchac ! Tchac !

Leur rire s’éteint soudain. « Dis, on veut plus jouer. »

Filles et garçons, nous nous regroupons près de la salle des fêtes, désertée. Nous cherchons un coin d’ombre. Je suis la plus âgée. Ils sont sept et lèvent leurs yeux vers moi ; ils attendent. Ils savent que je vais trouver un jeu, une histoire, de quoi les occuper, jusqu’au dîner.

J’aime leurs joues roses, leur moue fatiguée. J’aime qu’ils m’appellent à l’aide pour un caillou dans la chaussure, pour un genou abîmé.

L’été prochain, ils auront grandi. Ils auront oublié ce moment, la boîte à trésors enterrée sous nos pieds. Je ne saurai plus rien de leurs jeux d’enfants. Je serai trop vieille.

« Allons cueillir des mûres ! »

Leur explosion de joie résonne dans la torpeur de l’été.

Demain, c’est la rentrée.

jeux_d_enfants

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23 novembre 2007

Peur

J’ai dormi. Trop longtemps. Je le sais. La lumière du jour passe par l’interstice des volets. Ce n’est pas normal. Ce silence.

Pourquoi mon mari n’est-il pas venu me réveiller ? Pourquoi ma fille n’est-elle pas apparue encore pour sauter sur mon lit en criant « Maman ! C’est l’heure ! » ? Il est vrai que le dimanche, habituellement, ils me laissent dormir un peu plus, ces deux lève-tôt. Puis, ils viennent me trouver, en riant.

Ce silence.

Je me penche. Je cherche le réveil. Dix heures du matin. J’attrape un gilet, je descends. Ils ne sont nulle part. Leur manteaux et chaussures ont disparus.

Et là, soudain, au milieu du salon, brutalement, la peur me prend, toute entière. Je me dis qu’il est parti, avec elle, qu’ils ne reviendront plus. Je cherche dans la maison des signes de cette fuite. J’ai de l’eau au bord des yeux.

Ma tasse est sortie sur la table du petit déjeuner, seule. Aucune trace. Tout est en ordre, trop en ordre.

Un dessin posé sur mon ordinateur m’arrache le cœur. Je fonds en larmes.

Tout à coup, des coups frappés à la porte me font sursauter. J’ouvre, hésitante.

Ma fille se tient devant moi, un énorme bouquet de fleurs dans les bras, souriante. Mon mari, derrière elle, regarde mes yeux gonflés, étonné.

« Bonne fête maman ! »

Je suis stupide. J’avais oublié.

peur

22 novembre 2007

La mère

lam_re  La mère pose son ouvrage sur le guéridon, à ses côtés. Elle est fatiguée, ses traits sont tirés. La nuit, discrètement, est tombée sur la campagne, et la lune recouvre le jardin de sa douce clarté.

La jeune femme soupire et se lève, avec effort. Elle se dirige vers le grand miroir du salon, accroché au dessus de la commode. Elle se dit qu'elle ne sait plus à quoi elle ressemble. Elle détaille chaque parcelle de son visage : sa peau qu'elle trouve terne, ses yeux rougis d'avoir fixé l'aiguille, et ses cheveux fins tirés en chignon. Elle ne sait plus si elle est belle. Elle est mère, et cela envahit sa vie, toute sa vie, jusqu'au repos des enfants.

Elle prend une fleur en papier aux couleurs vives dans le vase blanc, de toute évidence décorée par de petites mains maladroites, et en écarte les bords pour lui donner du volume. Puis elle la coince sur son oreille, et se sourit dans le miroir.

Elle essaye de se souvenir du dernier jour où un homme l'a fait tournoyer au rythme d'une valse, de l'ivresse ressentie, de la légèreté.

Enfin, elle éteint chaque lampe, une à une, et monte se coucher, la fleur toujours accrochée à son oreille, oubliée.

21 novembre 2007

Couleurs

Explosions de douceurs. 

couleursDe la couleur.

Du rouge. Du bleu, dur, éblouissant.

Du vert, de l'ocre.

Et du magenta.

Tu barbouilles. Tu ris. Tu t'interroges. Les cheveux, verts, oranges ou violets ? Tu ne seras pas fâchée, dis maman, si je me fais plus grande que toi ?

Le pinceau tourne dans le godet. Je te regarde dessiner, tête penchée, soudain sérieuse, concentrée.

Des tissus. Des matières. De la couleur, encore, pour plonger dans les coussins, pour le plaisir du toucher, pour s'inventer des histoires.

Couleur profonde de tes cheveux fins, de tes yeux bruns, de tes joues rosies.

Couleurs des bibelots sur les étagères, ordonnés.

Couleurs des tapis, de la table basse, de tes jouets, oubliés.

Couleur de notre intérieur, douillet.

Loin de tout univers glacé,

En noir et gris.

20 novembre 2007

La petite fille

Depuis quelques jours déjà, je fais un rêve...étrange.petitefille 

Une petite fille, d’une huitaine d’années environ, tend les bras vers moi. Quelque chose me retient, fortement, par la taille, m’aspire vers le haut, m’empêche de l’atteindre.

Je touche le bout de ses doigts, je ressens la douceur de leur bulbe. Je sais que si je pouvais agripper les mains de l’enfant, j’aurais suffisamment de force pour la prendre contre moi, la bercer et l’emmener.

Ses yeux sont confiants. Elle attend, calmement.

Elle porte une robe blanche à volants, brodés de fleurs chatoyantes. Ses cheveux sont, en partie, ramassés sagement derrière son crâne. De grandes boucles dorées encadrent son cou fin. Elle sourit.

Tout le corps tendu, mes yeux sont plantés dans les siens, ne les lâchent plus.

Je voudrais réussir. Rien n’y fait. La « chose » qui me retient m’éloigne inexorablement de l’enfant qui, découragée, laisse finalement ses bras retomber le long de son corps, sans pour autant me quitter du regard…

Tout est fini, mais je sais qu’elle m’attend. Je sais que je réussirai bientôt, là où je viens d’échouer. Je sais que je me sentirai alors pleine et vivante, enfin complète.

Je sais que cette enfant…c’est moi.

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19 novembre 2007

On vous ment

Vous le saviez, non ?masque

On vous ment, depuis le début.

On vous dit que vous serez grand, libre, beau et intelligent, mais plus tard, beaucoup plus tard.

Et ce n’est pas vrai. Rien n’est vrai.

Vous traînez votre vous jusqu’à l’âge adulte, cahin-caha, tant bien que mal. Vous le parez d’instruction, d’expérience, d’un semblant de confiance en soi.

Allez, il vous arrive de vous trouver beau, parfois, dans la lumière blafarde de la salle de bain, le matin ; et intelligent, quand vous accumulez réussites professionnelles, diplômes, quand quelques malandrins félicitent votre ego.

Soyez rassurés, personne ne vous a réellement percé à jour.

Ils ont trop peur, tous, qu’en dévoilant votre secret, ils se retrouvent malencontreusement mis a nus, eux aussi.

On vous ment. On ne devient pas plus libre, ni plus beau, ni plus sage. On s’arrange avec soi-même. On promène son soi dans la vie, en évitant pertes et fracas.

On devient sociable.

18 novembre 2007

Le secret

Je crois qu’il est temps de parler de toi, du souvenir que j’ai conservé de toi.

Je crois qu’il est temps de sourire, aussi, à cette photo de classe où je me tenais bien droite, assise, les mains posées sur les genoux, sage, une frange épaisse couvrant mon front. J’avais le sourire timide à l’époque, rempli de fossettes, des yeux immenses, naïfs et doux.

Et toi, là, un peu plus à gauche, avec ton regard malicieux, tes airs de garnement et tes cheveux en bataille, tu étais,sans le savoir,mon plus grand secret.

Je t’aimais, comme on ne peut aimer qu’à neuf ans, en te laissant croire que je te méprisais, que je ne te voyais pas.

Et tu demeurais, à chaque seconde, ma préoccupation absolue.

Mes battements de cœur auraient du faiblir, avec le temps…

Alors, il est temps de parler du temps, justement, qui n’efface rien. Pauvre sagesse populaire !

Il est temps de parler du cœur, aussi, qui se meurt, et puis qui repart, toujours.

Mon coeur s’est arrêté, pour la première fois, à l’aube de mes seize ans, lorsque je t’ai vu embrasser cette fille brune, aux cheveux courts.

Il est temps de te dire…je t’aimais.

Tu ne l’as jamais su.

le_secret

17 novembre 2007

De bon matin

Une vie rêvée. 

Le réveil sonne, toujours trop tôt. Il fait froid. Je m’enroule en boule, profondément enfouie sous ma couette, pour que la vie m’oublie, encore une minute…

La sonnerie s’intensifie. Je me lève.

Café. Tartine. Le soleil apparaît timidement derrière les arbres sans feuilles. La cuisine prend des teintes lumineuses.

Mon cahier m’attend sur le bureau en bois, au fond du salon. Je m’installe, ma tasse fumante à nouveau remplie, posée près d’une pile de livres, en attente de lecture.

Quand mon texte sera prêt, je pourrai l’enregistrer et l’imprimer. Pour l’instant, je griffonne, je rature, je rectifie.

J’ai vue sur la côte sauvage. De l’endroit où j’écris, je peux voir des petits triangles blancs glisser doucement dans la baie. La mer est d’un bleu tendre ce matin.

Tout à l’heure, je descendrai sur le port…

La sonnerie stridente du réveil trouble mon rêve. Les enfants m’appellent, de la chambre à côté.

La lumière crue de la cuisine éclaire notre petit déjeuner.

Je ne suis pas écrivain.

lit

16 novembre 2007

La voiture verte

Elle me suit depuis un moment, cette voiture verte.                voiture_verte 

Je la vois dans mon rétroviseur, à quelques mètres de moi. Son clignotant s’allume, à chaque fois, juste après le mien. Je tourne à droite. Je jette un coup d’œil dans le miroir, et elle est à nouveau là, derrière moi.

Pourquoi serais-je suivie ?

Le chauffeur semble impassible. Son visage, que je distingue très bien, n’éveille aucun souvenir en moi. L’homme, au volant, semble même presque agacé par ma lenteur.

Clignotant. Et à nouveau, le sien se met en route, du même côté.

Je prends le virage un peu brutalement. Mes pneus font voler quelques cailloux. Je suis passée trop près des bordures. La voiture verte semble accrochée à mon sillage. Elle m’oblige à rouler, trop vite, dans cette campagne que je connais mal. J’ai hâte d’arriver chez mes amis. Je cherche du regard le panneau m’indiquant leur village. Mes mains sont moites et serrent le volant fermement. Je distingue enfin le petit chemin de terre qui me conduira à destination. Clignotant. Un regard dans le rétroviseur. Je respire, persuadée de voir la voiture verte filer sur la route principale.

Horreur ! Elle me suit encore.

Arrivée devant le garage de mes amis, je me résous à klaxonner bruyamment. Ils sortent, presque aussitôt. Jeanne accourt vers moi, étonnée, alors que son mari ouvre les bras au chauffeur de la voiture verte, le sourire aux lèvres.

« Notre invité surprise du week-end ! », me murmure Jeanne, sur un ton, lourd de sous-entendus.

15 novembre 2007

Etre une bonne fille

etre_une_bonne_fille    Je sais faire. 

Eteindre la lumière du garage, coincer la bassine de linge sur ma hanche et puis, descendre le long du mur gauche de la maison, dans le noir, les étoiles pour tout éclairage.

Je n’ai pas peur du buisson qui bruisse, des cailloux importuns ou du chat du voisin, qui s’échappe en me frôlant. Je ferme les yeux. Mes pas sont assurés. Je sais faire. J’ai l’habitude.

La clé tourne difficilement dans la serrure. Il faut l’enfoncer, un peu, mais pas trop. Je tâtonne pour trouver l’interrupteur. La cave s’éclaire brusquement. Il est tard. J’accroche chaque pièce de linge au fil, pendu près du plafond bas.

Vendredi soir. Il est vingt-deux heures. Je suis arrivée tout à l’heure. Dîner. Lessive. Je suis chez mes parents, et je ne me sens plus chez moi. Je voudrais être ailleurs, dans mon petit appartement de neuf mètres carrés, même seule, même désespérée.

Je ne viens pas pour le linge, je ne viens pas pour les voir, je ne sais plus pourquoi je viens.

Etre une bonne fille, je sais faire. Je ne sais faire que cela. Quitte à garder ce goût, dans ma bouche, tout le week-end.

La bassine vide, posée à côté de moi, je contemple le jardin silencieux. Le bruit de la télévision me parvient, atténué par les volets fermés.

Il faut rentrer.

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  • "Tu vois, moi, j'ai des passions, les livres, ça me sauve... J'ai traversé mes temps morts avec des gens qui ont oeuvré pour ça, ceux qui ont écrit... J'ai le livre en main et c'est du carburant pour ma vie à moi..." Jeanne Benameur
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