Dans ma boulangerie
Le petit garçon se tient devant moi. Il doit avoir environ sept ans. Sept ans…
Ce petit garçon, je l’ai déjà vu, je le reconnais. Il est venu, déjà, l’autre jour.
Il me regardait de biais, avec ses grands yeux bleus, son nez en trompette et ses cheveux blonds. Il me ressemblait.
Ca ne pouvait pas être un hasard. Non, ça ne pouvait pas.
Il me ressemblait, c’est tout.
Je me suis dit : « Oublie. N’y pense plus ! »
Il est là à présent, de nouveau devant moi. Il me regarde en face. Je pourrai le toucher, le prendre, l’emmener. Il me tend la main, des pièces au creux de sa paume.
« Une baguette, Madame, s’il vous plaît ! »
Il attend que je le serve, que je lui souris. Il attend, éventuellement un « Tiens mon bonhomme ! ». Il attend sa baguette.
Il ne s’attend pas à mon mutisme, à mon visage figé, à mes lèvres qui tremblent.
« Tiens, je te remercie. » les pièces chaudes au creux de ma main, je le regarde s’éloigner.
Je lui ai fait peur, c’est sûr. Et s’il ne revenait plus ?
Je vais l’attendre, patiemment. La prochaine fois, je lui sourirai, je lui donnerai un bonbon, peut-être.
La prochaine fois.
Mon dieu ! Comme il me ressemble ! Et si c’était lui ?