02 juillet 2016

Et pour toujours ce sera l'été, Valentin Spitz

etpourtoujours

 "Je ne suis jamais parvenu à les aimer."

Fils d'un acteur célèbre, Lucas passe à dix-sept ans ses vacances d'été dans la superbe villa que ce dernier possède à Saint-Tropez. Pour autant, ses relations avec son père ne sont pas faciles. L'adolescent profite donc de l'extérieur, des plages, mais surtout de ce qui se passe la nuit, fait des rencontres, notamment cette jeune-fille, Manon, qui partage pour les vacances un appartement avec des jeunes de son âge. C'est à ce moment-là que débarque Marie-Baptiste, l'agent de Marc, que Lucas surnomme Darth Vader. Les deux adultes annoncent au jeune homme leur intention de se marier. Mais Lucas ne pense qu'à sa mère, disparue quand il était enfant, et l'insistance d'Alain Van Meks, un policier, ancien ami de Marc, pour relancer l'enquête, perturbe beaucoup le jeune homme...

Avec ce roman, je pensais rentrer dans une bluette d'été, sans doute un peu orientée par cette couverture estivale. Et puis, dans les premières pages, je me suis assez vite rendue compte qu'il n'en était rien. Ce que je préfère je crois. J'ai finalement surtout pensé très vite à ma lecture de Bonjour Tristesse de françoise Sagan, à cette atmosphère de paresse vaguement érotique que l'été et l'adolescence conjugués générent. Et puis, l'intrigue gagne peu à peu en étrangeté, la violence, le doute, le chagrin s'invitent, en même temps que cette future belle-mère, qui semble s'arroger des droits sur un adolescent visiblement en souffrance. Peu à peu, le lecteur se sent en danger, est troublé, frémit jusqu'au verdict final. Valentin Spitz est chroniqueur sur iTélé, il étudie par ailleurs la psychanalyse et travaille à la Maison de Solenn (une maison pour adolescents). Il est connu pour être l'auteur de deux biographies : une de Najat Vallaud-Belkacem et une de Arnaud Montebourg. Ce roman est son premier roman et il est plutôt réussi.

A glisser dans sa valise pour l'été et à rajouter à ma petite Sélection Plage qui s'étoffe [clic ici].

Editions Jc Lattès - 17.50 € - Juin 2016

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08 juin 2016

Gaspard ne répond plus, Anne-Marie Révol

gaspard

 "Jadis, les miens se retrouvaient le soir pour une veillée autour du chef, de l'ancêtre ou du sorcier."

Gaspard participait au jeu de téléréalité Un jour j'irai à Shangaï avec toi et voici qu'il tombe malencontreusement du camion qui les transportait, lui et sa comparse Cindy. Personne ne se rend compte de rien, le camion continue sa route, tout le monde dort à l'arrière du véhicule. Grièvement blessé, Gaspard est récupéré au bord de la route par des individus, puis amené dans un village à l'écart de toute civilisation. En France, la nouvelle se répand vite de la disparition du jeune homme, la chaîne Sparkle TV est en émoi. Il faut retrouver Gaspard, surtout que sa mère, Eulalie, les menace d'un énorme scandale. Dans son village retiré, Gaspard se familiarise lui avec une étrange femme, My Hien, venue en son temps de France avec son fiancé Hubert, aujourd'hui disparu. La lecture du journal de ce dernier sera pour Gaspard source de réconfort et le nid d'une somme d'étonnantes révélations.

J'ai passé un moment très agréable en compagnie de ce livre léger par le ton mais dense par son contenu. Gaspard ne répond plus est un véritable roman choral qui nous fait voyager, entre la France et le Vietnam, mais également dans le temps. Car en effet, chaque personnage (d'une galerie haute en couleurs) est amené à raconter son histoire, à comprendre, à réfléchir sur les liens qui le lie aux autres et à sa destinée. En toile de fond, les maîtres de la téléréalité s'époumonent en vain, essayant de contrôler et de rentabiliser l'humain. J'ai pensé assez souvent lors de ma lecture à un calme et serein Rendez-vous en terre inconnue qui serait en concurrence avec un Pekin Express exalté. Voici une lecture amusante et distrayante, un bon gros pavé de plage, un roman feel good, que je conseille d'emporter avec soi dans sa valise cet été.

Editions JC Lattès - 21.50€ - 11 mai 2016

Anne-Marie Revol signe ici son premier roman. Elle avait reçu le prix Elle pour son témoignage paru en 2010 Nos étoiles ont filé [Ma lecture ici]

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18 mai 2016

Les Gens heureux n'ont pas d'histoire, Eloïse Lièvre

lesgensheureuxnontpasdhistoire

 "Rousse, cela voulait dire rebelle, singulière, irréductible, libre, sauvage. Antigone, rencontrée et incarnée un peu plus tard en classe de quatrième, l'était sans aucun doute. 
Même si la couleur de mes cheveux avait foncé, je l'étais, rousse, du moins à l'intérieur. Je n'ai jamais cessé de l'être."

J'ai su dès les premières pages de ce livre qu'il allait être un délicieux coup de coeur. En effet, il contient tout ce que j'aime, tout ce qui me fait vibrer en littérature, la recherche de soi, l'introspection et le regard acéré sur le monde qui nous entoure, la sensibilité. Eloïse Lièvre a choisi de nous raconter une histoire, la sienne, via quarante photographies, une pour chaque année qui passe, et quarante petits textes.  J'ai pensé au projet d'Isabelle Monnin dans Les gens dans l'enveloppe, et je n'ai pas été surprise de la retrouver en référence dans les remerciements en fin d'ouvrage. Comment vous dire...? Chaque phrase de ce livre a été un petit cadeau que j'ai reçu personnellement. De plus, la naissance d'Eloïse Lièvre est si proche de la mienne chronologiquement que nos histoires parfois se confondent, ou semblent se confondre, la mode vestimentaire, l'air du temps. Alors, j'ai eu le sentiment de suivre une histoire parallèle à la mienne, d'en comprendre le contexte. La sincérité qui se dégage de ce texte est si forte qu'elle emporte là où on ne pensait pas aller. J'ai été très touchée de suivre la vie d'Eloïse Lièvre, ses premières amitiés, ses premiers amours, mais aussi tout ce qui peut se cacher derrière ces poses, ces sourires de façade que l'on accorde parfois distraitement à l'objectif, la vie particulière, ordinaire - mais pas tant que cela - d'une enfant, qui devient une jeune fille, puis une femme. Cette jeune femme est éprise de littérature, elle laisse parfois sa plume s'envoler, divaguer, presque nous perdre, mais toujours la vie réelle revient, et la mythologie personnelle reprend pied dans le quotidien, tente d'y trouver sa place. Eloïse Lièvre est de celles qui cherchent un sens à leur vie, ce que je respecte profondément.
Les gens heureux n'ont pas d'histoire, certes, mais seulement quand il n'y a personne pour la raconter. Une lecture, bouleversante et intime, sincère, à ne pas laisser de côté.

Editions JC Lattès - 18€ - Avril 2016

Pour Sabine c'est "fort. Véritablement. Et sans éclat ni fadeur." et je partage son coup de coeur ! 

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07 mai 2016

Ahlam, Marc Trevidic

marctrevidic

"Farhat, avec sa chemise à fleurs, droit comme un i sur le pont de son bateau. Farhat toujours là, inchangé, dans un monde qui s'écroule."

Paul débarque un beau jour sur l'archipel de Kerkennah en Tunisie. Il est venu y chercher une paix perdue à Paris. Et le lieu qu'il découvre est un paradis. Cette découverte est un véritable soulagement. Le peintre, très célèbre, a d'ailleurs envie de s'établir quelques temps dans ce lieu qui l'inspire. De plus, il s'est pris d'affection pour un pêcheur, Farhat, et sa famille. A la mort de Nora, l'épouse, très belle femme que Paul aimait en secret, le jeune homme s'occupe de l'éducation des enfants du couple, Issam et Ahlam, doués tous les deux, l'un pour la peinture et l'autre pour la musique. Un rêve émerge, alors que les enfants grandissent, l'idée d'un spectacle qui pourrait leur amener la célébrité et l'aisance financière, la liberté que Nora souhaitait pour les siens. Mais rien ne se passe comme prévu. L'islamisme gagne du terrain en Tunisie. Issam se laisse séduire par le discours radicaliste de Nourdine. Ben Ali est chassé du pouvoir. Ahlam, devenue une belle jeune fille, regarde avec colère et désespoir son frère devenir un fanatique. Elle s'engage avec beaucoup de ferveur pour la démocratie dans la révolution du jasmin. L'affrontement entre l'univers d'Assim et d'Alham sera brutal.

Ahlam commence comme un joli conte, presque un peu candide. Et puis tout à coup tout change, et l'on retrouve ce que le juge Marc Trevidic connaît bien et a déjà beaucoup observé, le terrorisme et ses mécanismes souterrains. Autant j'ai été séduite en début de lecture par l'histoire imaginée par l'auteur, affective et artistique, autant cette deuxième partie, qui coïncide avec la radicalisation d'Issam m'a profondément intéressée, ainsi que tout le contexte de la révolution du jasmin, largement évoquée. Ce premier roman a peut-être quelques défauts, il n'est pas parfait, il pêche parfois par quelques longueurs explicatives et quelques candeurs sentimentales, mais c'est un roman fort, généreux, original, qui donne et promet beaucoup. J'ai aimé la place de l'art dans ce récit, et que la violence n'y soit pas édulcorée mais abordée de manière réaliste. Une lecture très utile, pour savoir et comprendre.

Editions JC Lattès - 19€ - Janvier 2016

Lu dans le cadre du challenge des 68 premières fois... qui met en avant des premiers romans sortis en ce début d'année 2016

68premieresfois

Les autres lectures de la fine équipe... Nicole à moitié convaincue - Instructif et nécessaire pour Joelle - Un coup de coeur pour Céline ! - Instructif et poétique pour Dominique - Agréable à lire pour Anita - Une belle histoire pour Gloria (pas de blog) - Violaine a été surprise - Saisissant pour Nathalie - Plutôt réussi pour Bénédicte !

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15 avril 2016

Moi et François Mitterrand, Hervé Le Tellier

moietfrancoismitterand

 "Ne doutez pas, cher Monsieur, que vos remarques recevront toute l'attention qu'elles méritent et qu'elles seront prises en considération par nos services dans les délais les plus brefs."

Le 10 septembre 1983, le narrateur de cette histoire (Hervé Le Tellier lui-même... d'après l'auteur), envoie une carte postale d'Arcachon à François Mitterrand le félicitant pour son élection, mais lui indiquant également qu'il passe d'agréables vacances, et que justement hier il a parlé de lui à table tout en dégustant des huîtres, excellentes d'ailleurs, bien qu'un peu laiteuses. Quelques mois plus tard, une réponse lui parvient, signée officiellement du Président de la République, lui précisant avoir bien reçu son courrier, et lui assurant qu'il sera examiné avec attention. Hervé Le Tellier s'empresse d'écrire de nouveau au Président, afin de lui souhaiter de joyeuses fêtes de fin d'année, missive qui recevra quelques mois plus tard une réponse du Président. Hervé Le Tellier est alors encouragé à continuer une correspondance qui se poursuivra, même après le décès de François Mitterrand, et avec ses successeurs.

Mouarf. Je ne veux rien vous dévoiler de plus de l'intrigue de cette histoire qui se déguste au fur et à mesure et avec délectation. Ici se joue un humour qui se base essentiellement sur le principe de répétition. Sincèrement, j'ai lu ce court livre assez hilare. Je ne m'attendais pas à trouver ce que j'y ai trouvé, j'ignorais tout de son contenu. Je savais seulement, sachant que l'auteur était membre de l'Oulipo, qu'il y aurait sans doute du jeu, et il y en a. Mais il y a aussi sous tout cela, sous cette correspondance qui ne s'arrête pas après la mort du premier président, sous le décalage évident que vous découvrirez à la lecture, une critique sous jacente des institutions... et un petit quelque chose, de glaçant et d'implacable, qui fait aussi un peu froid dans le dos. Une lecture assez jouissive.

Editions JC Lattès - 10€ - Mars 2016

Badge Lecteur professionnel Lu également de l'auteur Assez parlé d'amour [clic] 

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08 décembre 2015

Les Gens dans l'enveloppe, Isabelle Monnin... avec Alex Beaupain

lesgensdanslenveloppe

"Depuis près de trois ans, je vis avec eux. Ils furent d'abord mes amis imaginaires, figures projetés, canaux de pensées dérivées, messagers clandestins. Puis des personnes un peu surprises à qui j'expliquais mon idée. Ils sont maintenant des êtres qui m'ont confié le récit de leur vie - et je n'aurai jamais assez de mercis pour exprimer ma gratitude.

Je les ai inventés, chantés, rencontrés et pourtant.
Je n'ai évidemment aucune idée de qui sont les Gens de l'enveloppe.
Je les connais comme on peut connaître quelqu'un.
Un peu, si peu, presque pas."

En 2012, Isabelle Monnin achète un paquet de photographies à un brocanteur. Elles n'ont rien d'extraordinaire ces photographies, ne sont même pas très bien prises, mais elles racontent en creux une vie qui fait écho à l'auteure. L'idée lui vient alors petit à petit, en même temps qu'elle trouve des prénoms à ses personnages, d'écrire un roman d'après ces photographies. Le livre qui en résultera prend forme, tout d'abord écrire cette histoire, d'une petite fille qui s'appelle Laurence, de ses grands parents, d'un père délaissé par sa femme. Et puis, ensuite, elle partira à la recherche de cette famille, pour savoir, pour connaître les véritables prénoms, et ce qu'elle découvre enfin dépasse ses espérances...

Ce roman est un drôle d'objet et je crois que c'est sa particularité qui en fait naturellement un joli coup de coeur pour moi aujourd'hui, ainsi que ce qu'il m'a fait tout à l'intérieur, de très doux ! En effet, j'ai adoré le petit roman d'Isabelle Monnin qui introduit son livre, mais surtout je pense son enquête, l'émotion et la sincérité véritables qui se dégagent de ses démarches, et puis le CD, voulu par Alex Beaupain, comme un cadeau inattendu, pas du tout anodin, très fort, délicat et précieux, et pourtant glissé comme par inadvertance dans la quatrième de couverture. Avec Les Gens dans l'enveloppe on part à la rencontre d'une famille, et on pense à la sienne, on a envie de regarder nos vieilles photographies, de s'interroger sur l'imagination qu'elles pourraient ouvrir et faire éclore. Avec Les Gens dans l'enveloppe, on aime les gens aussi, tous les gens, les rencontres, et ça fait du bien.

Editions JC Lattès - 22€ - Septembre 2015

Un vrai bonheur pour Saxaoul Un coup de foudre pour Moka - Le billet de George qui parle du manque et du fil tendu entre elle et les romans d'Isabelle Monnin - Sur le blog de blablablamia ces mots sur l'éphémère des choses a été reçu en plein coeur - Un livre piqueté de marque-pages chez Cathulu - Un très joli roman qui résonne aussi chez Leiloona - ... 

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