La chambre est vide
Il ne reviendra plus… Les meubles portent encore l'empreinte de ses doigts ; je ne les essuierai plus. Il est parti. Ses bagages étaient là, il y a quelques minutes, dans ce carré de soleil et, maintenant, plus rien, que des poussières qui volent dans la lumière.
Il ne reviendra plus… Je me souviens, hier, ses pieds nus, humides, rosis par le froid, ont fait craquer cette planche du parquet si rugueuse sous mes doigts. Ils y ont laissé une trace sombre, éphémère. A présent, plus rien…que ce carré de lumière qui aggripe le plancher, ces poussières qui volent en tous sens et moi, allongée, la joue posée contre le bois du sol, qui les regarde tomber.
Il me semble que ma vie s'est réfugiée dans cette pièce étroite au plafond trop haut. De tous côtés, les objets me dévisagent avec les yeux des fantômes qui les ont touchés. J'ai un peu froid. Et pourtant, au dehors, l'été cuit des milliers de corps offerts à son souffle brûlant. Mais voilà, une brise de fin d'après-midi s'est infiltrée dans la place, par la fenêtre entrebaîllée. Elle n'a eu qu'à se frayer un passage sous les légers rideaux tirés ; c'était facile.
Oui, j'ai un peu froid… Il ne reviendra plus à présent, tout honteux, sécher de ses lèvres cette eau salée qui glisse sur ma joue meurtrie.