Invitation pour la petite fille qui parle au vent, Sébastien Fritsch
"L'une et l'autre s'étonnèrent de voir la première carte de loup collée au mur. L'une et l'autre gardèrent cette impression pour elles. Et aujourd'hui encore, l'une et l'autre y repensent souvent. Mais ni l'une ni l'autre n'en dira rien. Autour de Christophe, elles font tinter leurs verres de rosé pour trinquer à leurs retrouvailles, au mariage si proche et à la vie, tout simplement. [...] Estelle est loin maintenant. Clara et Salomé doivent revenir à leurs personnages de fleuriste amoureuse et de médecin humanitaire désabusé. Elles doivent reprendre leur place dans cet étrange film de la vie. Le seul dont le scénario n'est pas connu d'avance. Le seul dans lequel les premiers rôles peuvent être dévolus aux absents."
Tout commence comme un thriller qui mettrait sur le devant de la scène un médecin légiste amoureux et une vendeuse de bijouterie au chignon impeccable... Mais c'est mal connaître Sébastien Fritsch, rien n'est si simple, car nous plongeons tout à coup dans le futur, dans le passé, et nous comprenons vite qu'il est bien entendu question ici de cadavres - objet de toutes les préoccupations de Thomas, le père - mais surtout d'amour, fatalement imparfait, celui qui lie entre eux les membres d'une même famille, un couple et ses trois filles.
Clara, la seconde, la plus raisonnable, va se marier. Elle est fleuriste. Salomé, la plus jeune, au Kenya depuis deux ans en profite pour revenir, lourde de tout ce qu'elle a laissé là-bas. Estelle manque, c'est l'ainée, elle manque depuis si longtemps que la blessure de son absence est un récit à lui tout seul, une présence. Elle envoie des cartes, à l'effigie du loup qui la représente, une unique phrase au dos, bouleversante, "Je cherche toujours". Tout ce qui gravite autour est histoire d'amitié, d'imaginaire, d'enfance, d'écriture et de chemin de vie.
Je connais Sébastien Fritsch depuis quelques temps déjà, principalement via son blog... Il me fait d'ailleurs de temps en temps la gentillesse de commenter mes petits textes. J'ai lu ses deux précédents romans (Le sixième crime et Derrière toute chose exquise). Il m'avait déjà surprise et conquise à l'époque par sa capacité à inventer une structure savante et subtile. Il m'a étonnée encore une fois, émue au possible par ce roman-ci, que je ne peux qu'ajouter à mes autres coups de coeur. Sans doute quelques éléments ont dû faire écho en moi, sans doute... J'ai été touchée par le regard délicat qu'il posait par exemple sur l'adolescence. J'ai aimé cette toute nouvelle touche de profondeur qu'il donne à ses personnages, des êtres de papier soudain vivants que l'on se prend à aimer. Mais surtout, plus j'avançais dans cette lecture, plus je me suis sentie fière de le connaître, plus j'ai pensé qu'il aurait été dommage qu'elle ne soit jamais publiée cette histoire. Car c'est une belle histoire, une histoire merveilleuse d'amour, de tolérance et de liberté, ne passez pas à côté.
Note de lecture : Coup de coeur ! - Editions fin mars début avril - 17€ - Sortie le 23 Octobre 2010
Toutes les informations pour le commander sont ici http://marsavriledition.canalblog.com/
Des avis de lecteurs - Pour lire les trois premiers chapitres...
Dans la région, vous pouvez vous procurer des exemplaires dans cette librairie : Maison de la Presse 6, place du Champ de Foire 85600 Montaigu (Vendée)
Je me permets d'ajouter en point final une des petites variations que Sébastien Fritsch a inventé sur le thème du joli nom de sa maison d'édition...
"Il sera là fin mars, début avril au plus tard. On n'est jamais vraiment sûr, tu sais. Enfin non, tu ne sais pas. Tu ne sais plus. J'aurais bien aimé que tu saches. Et je me demande déjà, au cas où il te ressemblerait, si je devrais en pleurer ou en être heureuse."