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Les lectures d'Antigone ...
Ardoise magique

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Ben oui, à mon tour, j'ai craqué !

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11 décembre 2007

Bleu

Bleus tes yeux,

Bleu le ciel au dessus de ta tête,

Bleue la mer, au loin, brassée, en son mouvement, fort, régulier.bleu

Tu as choisi cette place, à l'ombre, pour te poser. Tu as raison, ils ne viendront pas te chercher, là, au fond du jardin, au pied de ce mur, près des rosiers. Tu t'es assis sur cette pierre plate, douce, couverte d'une mousse verte, fine et grumeleuse. L'arrière de ton short clair sera sûrement tâché tout à l'heure. Tu te feras gronder.

Tu as six ans, tout juste. Ils ont fêté cet évènement, hier, à grand renfort de musique, de grenadine et de bruits. Tu aurais préféré un baiser.

Bleue la mer,

Bleus les pelles, les râteaux et les seaux.

Tu ne veux pas les suivre, vers la plage, ton corps maigre et pâle, parmi leurs peaux bronzées. Tu les entends remuer placards et valises, à la recherche d'un maillot, d'une crème, d'un jouet, colère et plaisirs étrangement emmêlés.

Bleue la pile de livres, posée à tes pieds.

Tu ne sais pas lire, pas encore, tu apprendras à la rentrée.

Tu aimes à contempler les gravures travaillées de ces vieux livres oubliés.

Bleus tes rêves,

Bleues les fleurs d'hortensia de ta Bretagne aimée,

Bleue la solitude, fragile et précieuse, de ta quiétude, bientôt envolée.

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7 décembre 2007

Plaire

Je cherche à leur plaire.plaire

Voilà.

Et puis c’est tout.

Espoir déçu.

Ils ne me regardent pas.

Leurs yeux me traversent.

Pourquoi ?

Je cherche à leur plaire.

Je prends mon étendard.

Je le secoue énergiquement.

Il s’envole gentiment dans les airs.

Hep ! Hep ! Hep !

Rien.

Espoir déçu.

Je cherche à leur plaire.

Voilà.

Et puis rien du tout.

Du vide.

Du rien.

Du pas du tout.

Est-ce que je passe ma vie à ça ?

Je cherche à leur plaire.

Ils ne me regardent pas.

Quoi ?

Je n’ai pas mis les bonnes chaussures ?

Mon vêtement ne leur sied pas ?

Non.

Alors ?

Non, je ne sais pas.

Ils ne me regardent pas.

Je cherche à leur plaire.

Ma vie ne leur plait pas.

Tant pis.

Rien à faire.

Et puis.

Voilà.

Je cherche à leur plaire.

Espoir déçu.

6 décembre 2007

Pluie

Deux amants courent sous la pluie battante, enlacés.

On s’attend à ce qu’ils s’embrassent, sous un porche voisin, bien abrités, comme dans ces vieux films romantiques, à l’image lente et épurée.

Deux fragiles silhouettes courent sur les pavés luisants.

Ils pourraient tomber. La femme s’accroche au bras de l’homme. Ses talons hauts glissent. Ils s’arrêtent un instant. Elle se penche, tout le corps plié, et enlève ses chaussures, qu’elle tient à présent par la bride croisée.

Et la pluie, toujours, qui ne cesse de se déverser sur eux, sur nous, et sur la ville, sombre et embuée.

Deux imperméables foncés, serrés l’un contre l’autre, courent dans les ruelles obscures, bien mal éclairées.

Les escarpins brillent, par intermittence, au bout du bras de la jeune femme, en rythme,  balancés.

Un néon clignote dans la nuit, éclairant les façades des immeubles accolés.

Le couple ralentit, il semble épuisé. Derrière une lucarne vitrée, une femme entre deux âges leur tend deux tickets carrés, jetant un regard méprisant sur leurs deux visages ravagés.

Ils sont en retard. La séance est commencée.

pluie

3 décembre 2007

Parfum d'ailleurs

Je suis reine d’un royaume, merveilleux de beauté,

mon palais est de papier.

asie

Derrière les murs éphémères de ma fragile maison,

déambulent les ombres de suivantes affairées, graciles et muettes.

Dans un coin de ma mémoire, chante une musique d’enfance,

de rires partagés, de clochettes agitées, de claquements de semelles.

C’est une boite de Pandore que j’aime à ouvrir, à l’occasion, dans le secret de mon âme.

Nul ne peut s’en douter.

Je suis reine d’un royaume, que je ne connais pas.

Entourée de soieries, de parfums précieux, comblée de lourde féminité,

j’aime quand mon époux, le roi, me conte ses exploits, ses épopées du dehors.

Hier au soir, j’ai dérobé, sur son manteau, accroché,

le délicat feuillage d’une brindille pâle,

et l’ai enfoui, précipitamment, parmi mes écharpes soyeuses.

Un jour, sans aucun doute, glisseront ensemble

les multiples panneaux de cette prison dorée.

Le vent du matin, surpris de cette opportunité, s’engouffrera,

les prendra à revers, les soulèvera d’un simple souffle d’air,

pour les faire s’envoler, gracieusement,

tels des pétales légers,

de fleurs de cerisiers.

1 décembre 2007

Repas de famille

repasdefamille  Les assiettes et couverts font un bruit de cliquetis et de carillon, couvrant à peine le brouhaha des conversations.

            Les enfants jouent dans la cour, leurs bras blancs, dénudés, voltigent en tous sens, sous les premiers rayons du soleil d’été. Parfois, un adulte émerge à la lumière, les yeux plissés, appelle un enfant, remet un chapeau en place, disparaît de nouveau, comme happé, accueilli par des exclamations joyeuses.

            Il est de ces journées où il fait bon n’être qu’un enfant, et se contenter de grappiller dans une assiette à peine entamée.

            Il est de ces journées où les chaises deviennent dures à force de se dandiner dessus, à force de vouloir être ailleurs, à force de sourire.

            Il est de ces journées où le dessert à la fraise a un goût de dîner, où les paroles, les regards, masquent si mal les contrariétés, les disparités.

            Il est de ces journées où l’on se retrouve par habitude, par envie, pour une date, ou pour faire plaisir.

            Les enfants ne courent plus dans la cour. Un bébé s’est endormi sur le canapé. La journée s’épuise, doucement, tandis que des mains récupèrent des sacs, attachent des ceintures, claquent des portières de voiture.

            Il est de ces journées qui laissent un goût amer, paradoxal, de turbulence joyeuse et de profonde solitude.

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29 novembre 2007

Le magasin de musique

Quinze jours que je passe devant cette vitrine, tous les midi.musique

            Elle est toujours là, à l’intérieur, assise sur son tabouret haut, à grignoter un sandwich, le regard dans le vide. Elle vend des instruments de musique, des petits, des gros, des à vent, à cordes, à percussion.

            Je suppose que, d’ordinaire, elle accueille le client avec un grand sourire sérieux, qu’elle époussette consciencieusement avec un chiffon doux le lourd piano rutilant, ou qu’elle classe les partitions sur le présentoir du fond. Je suppose…je n’en sais rien. A l’heure du déjeuner, le petit panneau de l’entrée retourné, le magasin sombre dans l’obscurité, il est fermé. C’est alors que je passe, et que je la vois, dans son intimité secrète, dans sa fausse invisibilité.

            Quinze jours que je passe devant cette vitrine…mais demain je rentrerai, je franchirai ce seuil. J’ai pris mon après-midi. Je me suis renseigné. J’ai entendu sa voix fine au bout du fil. Je n’ai pas le choix, si je veux la voir, et la revoir encore ! Le Bonheur n’a pas de prix. J’ai vendu ma voiture, j’ai réservé le grand piano noir. Depuis, je me déplace à pieds.

            Elle m’a promis, que pour le montant payé, elle m’assurerait des accordements réguliers, à mon domicile. Demain, le piano me sera livré, elle touchera de son regard les objets de mon quotidien.

        J’oserai la courtiser.

27 novembre 2007

Adieu

Je navigue, entre toi et le ciel, par delà les nuages, au dessus des possibles.

Mon ami, je m’en vais, sans espoir de retour.

A l’aube du plus jamais, j’embrasse ton âme de mes lèvres écarlates et je serre ta vie contre mon corps froid.

Avant que de partir, je dépose ça et là, des cadeaux de bonheur, des surprises parfumées de moi, que tu découvriras, les jours vides de couleurs.

Entends-tu le bruissement de mes ailes, lorsque le soir tombe, et que tu restes assis, rêveur, sur la terrasse de notre pavillon ?

Ils m’ont fait cet honneur charmant, de me doter de grâce.

Mon ami, je m’en vais…

Ecoute ! Elle sonne à ta porte.

Va ! Elle t’attend.

Ne la fais pas languir,

Celle qui saura, à présent

Bien mieux que je ne peux,

Te recueillir.

adieu

26 novembre 2007

Au café

Je l'attends, dans ce café.aucaf_

Derrière les fenêtres embuées, je vois défiler les ombres des passants affairés, par grappes. Les aiguilles de l’horloge, au dessus du comptoir, avancent doucement dans le brouhaha ambiant. Il sera bientôt quinze heures. Elle ne va plus tarder.

Je l’attends. Je m’installe un peu plus confortablement sur ma banquette en moleskine marron, de celles qui craquent sous le poids lorsque l’on s’assoit. Je m’inquiète.

La voilà ! Elle passe les portes battantes avec son sourire triste, celui que je rêve d’embrasser. Elle vient vers moi et se glisse rapidement sur la banquette d’en face, sa place habituelle.

Le visage levé, elle essaye d’attirer l’attention du serveur, il ne la remarque pas. Son regard me traverse alors. Elle retire son écharpe. Je lui souris. Elle esquisse un haussement d’épaule, je la sens s’apaiser.

Le serveur approche enfin. Elle lui commande un café, serré.

Et c’est pour ce moment là que je l’aime, pour cet instant où, sa tasse fumante à ses côtés, elle se sentira assez confiante pour sortir un livre épais de sa besace usée, pour craquer sa tranche, sans vergogne, et se plonger dans sa lecture.

Pour elle, je n’existe pas.

Le soir venu, pourtant, dans l’obscurité de sa chambre, elle me murmure des suppliques, presque sans y croire.

Je l’aime, sans espoir, mais je suis, et je resterai, pour toujours, son ange gardien.

25 novembre 2007

Naissance

Elle est née d’une femme, comme tout un chacune.

Lancée dans l’existence, comme un chaton perdu, par inadvertance, ou par miracle, elle a survécu. 

Au détour de sa vie, tu l’as prise contre le corps, tous ses muscles tendus.

Elle était maigre, pour ne pas peser, douce, calme, apeurée.

Elle est née, de toi, réellement, un soir d’Août, à ton insu. Epuisée par ses douleurs de femme, doucement, tendrement, tu as lavé sa peau. Sa membrane s’est ouverte, déchirée.

Elle est née, pour la seconde fois, d’un homme.

Tu lui as donné ton nom, pour habiller sa naissance.

Tu lui as donné ton avenir, pour la maintenir debout.

Tu as aimé son corps ; tu as aimé son âme.

Elle est devenue fleur.

Elle est devenue femme.

naissance

24 novembre 2007

Jeux d'enfants

Tchac ! Tchac !

En garde !

Tchac ! Tchac !

Tremblez, sacripants ! Vous ne pourrez m’échapper !

Tchac ! Tchac !

Je suis corsaire, mais femme, aux seins bandés. Je suis chef de bande. Ma petite troupe me suit, médusée. Mon épée imaginaire, brandie dans les airs, est vraiment impressionnante.

Tchac ! Tchac !

Les deux garçons, plus jeunes que moi, promus, bien malgré eux, ennemis à combattre, se cachent en riant.

Tchac ! Tchac !

Leur rire s’éteint soudain. « Dis, on veut plus jouer. »

Filles et garçons, nous nous regroupons près de la salle des fêtes, désertée. Nous cherchons un coin d’ombre. Je suis la plus âgée. Ils sont sept et lèvent leurs yeux vers moi ; ils attendent. Ils savent que je vais trouver un jeu, une histoire, de quoi les occuper, jusqu’au dîner.

J’aime leurs joues roses, leur moue fatiguée. J’aime qu’ils m’appellent à l’aide pour un caillou dans la chaussure, pour un genou abîmé.

L’été prochain, ils auront grandi. Ils auront oublié ce moment, la boîte à trésors enterrée sous nos pieds. Je ne saurai plus rien de leurs jeux d’enfants. Je serai trop vieille.

« Allons cueillir des mûres ! »

Leur explosion de joie résonne dans la torpeur de l’été.

Demain, c’est la rentrée.

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  • "Tu vois, moi, j'ai des passions, les livres, ça me sauve... J'ai traversé mes temps morts avec des gens qui ont oeuvré pour ça, ceux qui ont écrit... J'ai le livre en main et c'est du carburant pour ma vie à moi..." Jeanne Benameur
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