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Les lectures d'Antigone ...
Ardoise magique

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Ben oui, à mon tour, j'ai craqué !

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14 mai 2010

Tous à la campagne !, Judith O'Reilly

tous___la_campagne"Le pays est saturé d'océans. Les prairies, les hautes herbes, les tapis de jacinthes sur les pentes boisées, tout cela est mouvant comme la mer. Cela me va bien. Depuis que j'ai emménagé ici, j'ai surtout l'impression de me noyer : je me débats, je tremble de peur. Aujourd'hui, en traversant la campagne, je me suis aggrippée à mon volant comme à un bois flotté à la surface de l'océan. J'ai beau comprendre son raisonnement, je ne peux m'empêcher de me sentir rabaissée et injustement traitée par cette dame pasteur autoritaire qui s'est avisée de me dire que je ne suis pas la plus populaire des filles de l'école ; que je suis une maman blogueuse, et que je devrais savoir que cela ne va pas du tout. Les jacinthes le savent. Ma bouche se remplit d'eau salée tandis que de puissantes vagues me submergent."

C'est sans doute parce que Judith est enceinte qu'elle a accepté l'idée de son mari, tous quitter Londres pour Le Northumberland, et habiter à l'année le petit cottage qu'ils ont là-bas. Déjà mère de deux garçons en bas âge, elle n'imagine pas ce qui l'attend mais, lorsqu'elle embarque pour le nord, regrette avant tout d'avoir laissé derrière elle sa ville bien aimée, ses habitudes confortables, sa carrière de journaliste et ses amis.

Sous la forme hachée et quotidienne d'un journal, c'est sa propre histoire que nous raconte Judith O'Reilly, qui a réellement vécu cette expérience et qui l'a quotidiennement retranscrite sur son blog www.wifeinthenorth.com .
Tous à la campagne ! est présenté en quatrième de couverture par l'éditeur comme un livre "hilarant", je ne dois pas avoir la même conception de l'hiralité, parce que j'ai été émue au delà du possible par les difficultés de cette mère à gérer ses trois enfants dans une campagne hostile dont elle n'a vraisemblablement pas tous les codes et le mode d'emploi. De plus, ce conjoint qui la contraint à s'éxiler dans le nord, travaille le plus souvent sur Londres et la laisse des semaines entières seule avec des bambins la plupart du temps malades, une maison en travaux et des pannes de voiture à répétition. Elle est bien courageuse Judith et bien gentille de ne pas envoyer promener une fois pour toutes ce mari égoïste que j'ai énormément haï au cours de ma lecture. Elle est bien tenace de chercher, malgré la froideur qui l'environne, à lier amitié autour d'elle.

Voici un livre que j'ai énormément aimé, qu'on se le dise. Judith O'Reilly possède un ton d'écriture, vif, alerte et bourré de dérision très attachant. Comme dans Quand souffle le vent du Nord de Daniel Glattaeur, ce titre est le reflet de nos nouveaux modes de communication. En effet, cette maman blogueuse est confrontée à un moment donné, suite à des problèmes de mauvais traitements à l'école, à la lecture de ses écrits par ses connaissances et cela influence l'attitude des autres parents envers elle.
Sinon, je me suis beaucoup retrouvée dans les désarrois de son quotidien (pas toujours évident la vie de maman quand papa est souvent loin)...et j'ai aimé sa manière de ne surtout pas être une mère parfaite, de quoi déculpabiliser nombre d'entre nous. Merci Judith O'Reilly !

bouton3 Note de lecture : 4.5/5 - 19€ - Avril 2010 - Ed. Mille Comédies

La lecture de Cuné - Merci cathulu ! - Ptitlapin l'a lu aussi...

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9 mai 2010

Sutures, David Small

sutures"En revenant de l'hôpital, j'ai pensé : comme c'est curieux ! On entre un jour pour une soi-disant opération bénigne, et cette opération en devient deux. A votre réveil, le tumeur qui vous défigurait a disparu. Mais votre glande thyroïde et l'une de vos cordes vocales aussi."

Nous sommes dans les années 50, et le petit David qui vit au sein d'une famille fermée à la communication grandit entre un père radiologue et une mère dont les accès de fureur éloignent les siens.
Dès son enfance, le père de David utilise des séances intensives de radiographie afin de soigner les problèmes de sinus de son fils, ce qui sera sans doute la raison de son cancer et de la tumeur maligne qui prend naissance dans son cou lorsqu'il a onze ans. Négligents, indifférents et violents dans leurs propos, ses parents attendront trois ans et demi avant de le faire opérer pour ce qu'ils prennent au départ pour un simple kyste. Il y perdra sa voix mais l'assurance qu'il doit se sauver et s'exprimer désormais par le biais de ses dessins...sutures1

J'avais repéré cette BD il y a quelques temps déjà, et en la découvrant sur les étagères de ma bibliothèque, j'ai voulu tenter sa lecture. Dans ces cas-là, quand je ne suis pas sûre de moi, je feuillette, car je ne sais pas vous mais cette couverture là fait un peu peur... je trouve. Heureusement j'ai aimé ce que j'ai vu dans les pages intérieures, alors je l'ai prise.
Cette histoire est en fait l'histoire vraie de David Small, un récit autobiographique poignant qui m'a beaucoup plu. Il n'est pas si sombre qu'il n'y paraît, quoique je n'aimerais pas devoir cotoyer une famille telle que celle de cet enfant malmené qui se réfugie dans son imagination, et le monde à part d'Alice au pays des Merveilles, pour se protéger.
Il y est aussi question entre autres des progrès pervers de la médecine de l'époque, du mal que peuvent faire à l'entourage de mauvais choix de vie et des remèdes possibles à l'absence de bonheur...
Une lecture troublante et forte.

Biblioth_que_et_LAL Delcourt - 19.90€ - Janvier 2010

8 mai 2010

Bienvenue à Egypt Farm, Rachel Cusk

bienvenue_egyptfarm"Quoi qu'il en soit ça m'a fait réfléchir, tu sais, sur Egypt, ce que ça représentait au final. Je veux dire, papa en a toujours parlé comme d'une vraie ferme, comme de quelque chose qui devait être entretenu et travaillé. Dès qu'on a pu marcher, quasiment, il a fallu qu'on donne un coup de main, avec les moutons et les foins et les clôtures, et on l'entendait en parler jour et nuit, et aujourd'hui je commence à me demander si ce n'était pas un peu une arnaque. Tu sais, s'il ne s'en servait pas pour nous contrôler. Je veux dire, si ça n'est pas une ferme, alors qu'est-ce que c'est ? C'est juste une belle maison, c'est tout. Une belle maison."

D'Egypt Farm, Michael conserve une image idéale, proche de sa définition personnelle de l'"âge d'or".
Invité à l'adolescence par la soeur de son camarade d'études à venir y assister à une fête d'anniversaire, il est fasciné par la liberté d'esprit de cette famille loufoque et bohème qui semble passer outre les dissensions et les contraintes.
Devenu adulte, et père d'un petit garçon de trois ans, il décide un beau jour de reprendre contact avec Adam, son ami, et de repartir vers Egypt Farm... Chez lui, sa femme s'est éloignée de lui et il est resté troublé par la chute accidentelle du balcon de leur maison, qui aurait pu lui coûter la vie.
Mais, se confronter aux illusions de sa jeunesse est toujours un pari aventureux et Michael découvrira que derrière un souvenir enchanteur se terre parfois une noirceur insoupçonnée.

Egypt farm est le roman du désenchantement par excellence. On part d'une scène première, idéale, pour tomber jusqu'au mot final dans le réalisme net et sans fioritures le plus vif. Il est de ce récit comme des tragédies grecques, on nous propose d'emblée une sorte de fin annoncée que l'on espère pourtant pouvoir éviter en tant que lecteur.
J'ai eu une lecture laborieuse et morcelée de ce titre, ce qui ne m'a pas permis de l'apprécier à sa juste valeur. Cependant, la qualité d'écriture de Rachel Cusk est indéniable et je n'ai pas échappé à l'envoûtement de l'univers qu'elle nous propose, ni à sa manière de brosser ses personnages avec grâce et talent. J'ai aimé particulièrement sa façon de parler des tout petits enfants, qui peuplent ce récit de manière discrète en arrière-plan, de décrire leurs gestes, leurs positions, leur présence.
Je possède Arlington Park dans ma PAL, je l'espère seulement un peu plus optimiste...

bouton3 Note de lecture : 3.5/5 - Février 2010 - 7€ - Editions Points

Elles l'avaient lu en grand format sous le titre Egypt Farm...
Clarabel souligne avec justesse un sentiment de contradicition ressenti suite à cette lecture - Une déception pour Cathulu - Papillon est heureuse de l'avoir juste emprunté...

6 mai 2010

Tout seul, Chabouté

toutseul"UN NAVIRE DE PIERRE IMMOBILE...
...UN BATEAU DE GRANIT QUI NE TANGUE PAS...
...IL NE NOUS EMMENE NULLE PART...
...IL N'ACCOSTE JAMAIS...
...A BORD D'UN PHARE, ON NE REJOINT JAMAIS AUCUN PORT..."

Un bateau de pêche accoste chaque semaine un phare automatique, censé être vide de toute vie humaine. Le propriétaire du bateau dépose deux caisses de ravitaillement puis s'éloigne... Son nouvel employé s'étonne et questionne. Qui peut vivre là ? L'inconnu à qui le pêcheur livre des vivres et des médicaments ne se sent-il pas seul ? D'ailleurs, tout seul est le surnom que l'on a donné à l'enfant mystérieux, déformé dit-on, devenu vieux, qui y séjourne depuis toujours, depuis en fait que ses parents, gardiens de phare, sont décédés... Qu'est-ce qui pourrait rompre sa solitude, lui faire plaisir ?

tout_seul_pl_bVoici un album magnifique, dont les dessins précis et fins, en noir et blanc, ont la faculté étonnante de faire du bruit... A lire les vignettes silencieuses, peu bavardes, on pourrait en douter mais tout à coup, en cours de lecture, surgit le son de la mer, celui des vagues qui tapent contre les rochers, et puis les mouettes et le vent se mettent de la partie.
Comment survivre lorsque l'on a pour seule compagnie un dictionnaire et un poisson rouge inexpressif ? On survit grâce à la magie des mots et à son imagination.
Un concentré d'émotion, de sensibilité et une bonne dose d'onirisme à faire fondre n'importe qui...- pfff le coeur en déborde - dans ce livre qui porte haut l'art de la BD, et un album qui s'avère lumineux, alors qu'on pourrait le penser d'emblée sombre comme sa couverture. Une belle découverte, enfin, suite à quelques autres déconvenues... A suivre.

Biblioth_que_et_LALEdtions Vents d'Ouest - 25€ - Septembre 2008

Une autre critique enthousiaste sur Biblioblog

28 avril 2010

Chute d'une noisette, Christian Girier

chute_d_une_noisette"A considérer la surface d'une coquille de noisette, on peut, sans trop se tromper, l'estimer à dix centimètres carré environ. Si par une pression quelconque cette noisette est écrasée, sa coquille brisée, outre le fruit extrait que ne tardera pas à être mangé, il restera au sol un certain nombre de débris dont la superficie moyenne sera estimée entre zéro virgule un et deux centimètres carré environ, quoique, dans les faits, aucun fragment ne soit semblable ni par la forme, ni par la taille, ni même par la teinte."

Henriette et Yvonne sont voisines, deux personnes âgées qui s'entraident, font leur course ensemble, s'aiment et se détestent à la fois, craignent l'une pour l'autre et se jalousent. Il y a également Ahmou, qui rempli les rayons au supermarché du coin au lieu de faire de la musique, son rêve. Et puis Claudine Chapiron, la femme du professeur, qui exécute tous les vendredis sa recette de génoise aux noisettes et ravit ainsi ses convives ou les collègues de son mari. Tout ce petit monde se croise sans se voir mais c'est compter sans cet impérieux besoin de cohérence face à l'indicible non-sens du chaos qu'est l'ordre narratif...

Voici un petit livre très sympathique et divertissant qui ne fait pas que disserter sur les vertus de la noisette, qui sont grandes croyez-le, mais qui nous emmène avec une agilité verbale bien agréable dans une histoire d'amitié orageuse, version troisième âge, auquelle j'ai totalement adhérée. Si vous avez aimé L'avant-dernière chance de Caroline Vermalle, sans doute serez-vous conquis aussi par ce roman.

J'ai aimé quant à moi cotoyer des noisettes quelques pages... Ces petites choses comestibles sont toujours associées dans mon esprit à de tendres souvenirs d'enfance.

Et en refermant cet ouvrage, on se dit encore une fois combien nous sommes ignorants des vies de ceux que nous croisons tous les jours sans les connaître...

Merci à l'auteur !

bouton3 Note de lecture : 3.5/5 - Les cahiers de l'égaré - 15€ - Janvier 2010

Voilà ce qui m'avait donné envie de découvrir ce titre...

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20 avril 2010

Riven Rock, T.C. Boyle

riven_rock"Ce qui était arrivé à Arabella Doane était certes regrettable - horrible même, impardonnable -, mais maintenant ils avaient tous une mission, et cette mission avait pour nom Stanley McCormick. Car Stanley McCormick se remettrait, ils feraient ce qu'il faudrait pour ça, et quand il irait mieux, il les récompenserait et c'est alors qu'ils auraient leurs orangeraies, leurs bungalows et le reste. Voilà. C'était ça, et rien d'autre, dont il était question."

Dans un train partant pour la Californie, pour Riven Rock plus précisément, un homme est prostré. Dans le wagon qui lui a été réservé, entouré d'infirmiers, de gardes du corps, il est ignoré des autres passagers qui ne peuvent deviner ce qu'il est effectivement, l'héritier du clan McCormick, le descendant millionaire de l'inventeur de la moissoneuse batteuse Cyrus Mc Cormick. Stanley part pour un asile doré dont il ne sortira plus jamais. N'arrivant plus à contrôler ses accès de violence, ses pulsions envers les femmes, entendant constamment des voix, le jeune-homme timide est devenu un danger pour autrui, pour le sexe opposé en particulier, mais aussi pour lui-même. Sa jeune femme, Katherine Dexter, une des premières docteur ès sciences et féministe convaincue, veillera constamment sur lui, de loin, par téléphone ou jumelles interposées. Voir son mari lui est depuis l'internement de ce dernier interdit. En fait, plus aucune femme ne croisera la vue de son époux pendant près de vingt ans. Des psychiatres de toutes sortes se tiendront à son chevet, en vain.
Le jeune couple qui souriait calmement sur la photo de leur mariage en 1904 à Genève n'est plus. Il n'était peut-être dèjà à ses prémices qu'un rêve éveillé...et n'a pas survécu au désastre de leur lune de miel.

T.C. Boyle raconte ici le destin véritable d'une figure emblématique de l'amérique du début du siècle dernier, Stanley McCormick. Il s'attache à ce personnage naufragé qui sombre définitivement dans la folie, après avoir goûté aux mondanités fitzgéraldienne de l'époque, hanté par une névrose sexuelle qui trouve essentiellement sa source dans sa peur viscérale des femmes, une certaine hérédité et l'omniprésence d'une mère castratrice, Nettie McCormick. Il s'attarde également en parallèle sur la personnalité des figures qui gravitent autour de lui, son épouse Katherine, ses différents psychanalystes aux méthodes hasardeuses, et son infirmier en chef Eddie O'Kane, noceur invétéré, alcoolique impénitent, dont la fidélité à son "patron" et le réel intérêt qu'il témoigne au malade dont il a la charge est le sel évident de ce roman.
Une lecture au ton croustillant et à la verve sympathique qui brosse dans le sens contraire du poil, et qui pointe du doigt les travers d'une "certaine amérique", une amérique qui tente de dissimuler ses névroses et ses failles à coups de dollars. Une saga dense, intéressante et prenante, que j'ai beaucoup aimé lire, malgré son thème sulfureux et le volume conséquent de ses pages.

bouton3 Note de lecture : 3.5/5 - Livre de Poche - 8.25€ - Nov 2001

Riven Rock a été lu dans le cadre d'un partenariat. Je remercie donc ici les éditions du Livre de Poche et l'incontournable BoB... !

Une critique de Catherine Argand pour Lire..."Riven Rock allie la solidité d'une facture classique à l'esprit caustique et toujours intact d'un écrivain insolent."

D'autres destins mêlés de folie sur ce blog ?

Séraphine, Françoise Cloarec 
La femme de l'Allemand, Marie Sizun

15 avril 2010

La couleur de l'aube, Yanick Lahens

la_couleur_de_l_aube"Des quatre coins de la ville, des feux montent des ordures empilés et nous brûlent les yeux. A la fin de chaque crépuscule, des pyromanes crucifient la misère de Port-au-Prince pour la faire taire. Nous avançons apaisés, à moitiés aveugles dans une brume mensongère. C'est le moment où la nuit descend sur le visage de Mère. Ce visage unique de qui ne part jamais, de qui reste pour toujours auprès de vous, malgré l'orage sur votre vie, malgré l'incendie qui la ravage. Le visage de Mère est un morceau de terre douce. Sur cette terre nous posons nos pieds nus sans crainte de nous faire mal. A tant vouloir fouiller la nuit, Mère est un bateau qui fend une eau noire. Elle avance mais ne va nulle part. A l'intérieur d'elle le silence est aussi profond que dans le grand ventre d'eau de la mer. Aurait-elle perdu le nord ? Elle a si peur de chavirer. Oui, si peur. Par moments la lune déverse de la chaux vive et, soulagée, elle scrute le monde dans cette blanche lumière. Et elle met le cap à nouveau vers l'attente de son fils."

Dans une maison de Port-au-Prince, on s'inquiète de l'absence du plus jeune frère de la famille, Fignolé. Quelque chose dans l'air, une menace, règne et nourrit l'angoisse. Angélique, infirmière sage et soumise, et sa soeur, Joyeuse, sensuelle et révoltée, enquêtent et parcourent la ville, tout en rêvant secrètement d'une vie meilleure qui donnerait sa part belle à l'amour et à l'apaisement...

Grâce au collectif édité par le Serpent à Plumes en faveur des sinistrés d'Haïti, j'ai découvert la plume de Yanick Lahens. Je voulais en lire plus, voici pourquoi j'ai ouvert ce livre-ci.
Mes impressions de lecture sont très complexes. Dans l'ensemble, j'ai beaucoup aimé ce roman, que je vous recommande. Yanick Lahens a une écriture extraordinaire, forte et sensuelle, terriblement évocatrice. Que de paragraphes à citer telles de petites perles... !! Par ailleurs, ce récit, à la texture apocalyptique, semble annoncer des terreurs à venir, politiques et physiques, et lorsque l'on songe aux évènements que cette île vient d'endurer, cela donne rétrospectivement froid dans le dos. Ensuite, je me suis attachée aux personnages à tel point que cet écrit m'a semblé trop court. Angélique et Joyeuse prennent la parole tour à tour, et l'on se prend à admirer ces femmes de caractère, sans hommes, qui luttent tout simplement pour vivre.
Mon petit bémol vient de "l'économie de moyens" que l'éditeur évoque en quatrième de couverture. Il m'a fallu de nombreuses pages avant de repérer les protagonistes, comprendre qui avait la parole, qui était qui, et cela me gêne toujours de devoir ainsi avancer dans le flou en lecture. Sans cela, ce titre aurait été sans conteste, un grand coup de coeur !!
Mais je chipote je chipote...
Car cela dit, je suis heureuse d'avoir ouvert ce roman, que je reprendrais bien à présent pour le relire une seconde fois, ce que je ne fais jamais d'ordinaire. Je suis heureuse de cette rencontre avec l'écriture de Yanick Lahens, que je vais renouveler dès que possible en lisant son premier roman Dans la maison du Père.
En somme, une lecture découverte qui m'ouvre quelques perspectives. Voilà qui est bien jubilatoire !

bouton3 Note de lecture : 4.5/5 - 20 € - Sabine Wespieser éditeur - Nov 2008 -

Biblioth_que_et_LALPour info, le blogoclub aura pour thème les auteurs haïtiens le 1er juillet prochain - Ce titre a reçu le prix RFO 2009 - Vous trouverez en cliquant sur le lien ci-contre la fiche du livre sur le site éditeur avec un extrait pdf à télécharger -

12 avril 2010

Les lieux sombres, Gillian Flynn

les_lieux_sombres"La plupart des partisans de Ben sont des femmes. Oreilles en chou-fleur et dents longues, permanentes et tailleur-pantalon, lèvres serrées et crucifix autour du cou. De temps à autre, elles se présentent sur le pas de ma porte, l'oeil trop brillant pour être honnête. Elles m'expliquent que mon témoignage était faux, qu'on m'a induite en erreur, contrainte, qu'on m'a convaincue d'un mensonge quand j'ai juré, à l'âge de sept ans, que c'était mon frère qui avait commis les meurtres. Souvent, elles me hurlent dessus, et elles ont toujours plus de salive qu'il n'en faut. Il y en a plusieurs qui m'ont carrément giflée. Ce qui les rend encore moins convaincantes : une mégère hystérique au visage écarlate se discrédite très facilement, or je cherche toujours une bonne raison de les discréditer.
Si elles avaient été gentilles avec moi, j'aurais presque pu me faire avoir.
"Non, je ne parle pas à Ben. Si c'est de ça qu'il s'agit, je ne suis pas intéressée.
- Non, non, non, ce n'est pas ça. Il vous suffirait de venir à...cette espèce de convention, pour ainsi dire, et nous laisser vous poser quelques questions. Vous ne pensez vraiment pas à cette soirée-là ?"
Zonedombre.
"Non."

Libby Day a sept ans lorsque sa famille, mère et soeurs, est sauvagement massacrée dans la ferme familiale. Elle réchappe de justesse au drame en se sauvant, y perd quelques doigts de pied et de main, mais surtout la chaleur d'une famille et la chance de croire un jour en elle. En effet, persuadée d'avoir entendu son frère aîné ce soir-là hurler dans la maison, elle le désigne comme le meurtrier et perd ainsi le dernier des siens.
Vingt cinq ans plus tard, c'est une jeune femme qui survit grâce aux dons et à de menus larcins que nous retrouvons. A court d'argent, elle accepte à contre-coeur de participer à une réunion spéciale, organisée par un comité de fans obnubilés par les meurtres mystérieux. On lui demandera de reprendre l'enquête, de chercher à nouveau la vérité. De guerre lasse, attirée par l'argent facile, elle accepte.
Finalement, reprendre ainsi le film de cette nuit-là, résoudre une fois pour toute l'énigme des zones d'ombre du passé, lui permettra peu à peu de reprendre le fil de sa vie...à elle, enfin.

Voici un thriller qui tient son lecteur en haleine, c'est certain, malgré le volume imposant de ses pages. L'écriture est superbe, les doutes sont entretenus savamment jusqu'à la fin, et les personnages attachants. Comment résister aux souvenirs de cette marmaille enfantine, et féminine, que l'on sait devoir s'éteindre quelques heures plus tard ? Comment ne pas compatir, et ne pas s'énerver en même temps, de l'immobilisme et du découragement de la mère, Patty, engluée de fatigue et de soucis ? Beaucoup de talent, donc, dans ce roman et comme il est souligné en quatrième de couverture, pas "de clichés", ni de "manichéisme". Cependant, pour la lectrice que je suis, peu encline à nager trop longtemps dans l'horreur, peut-être beaucoup trop de misère, trop de désolation. J'ai retrouvé quelques impressions ressenties à ma lecture du Château de verre. Parfois, c'est ainsi, mon coeur de maman prend toute la place, et se serre. Et pourtant, il est honnête et émouvant, ce tableau d'une amérique de dernière zone, terriblement net et humain ; il prend en compte la complexité de nos comportements.
Un moment de lecture, en définitive, rempli d'émotions contradictoires, de plaisir et de retenue.

bouton3 Note de lecture : 4/5 - Edititions Sonatine - 22€ - Février 2010

Un grand merci à Solène ! - Amanda pinaille mais l'a lu également avec avidité - Cathulu n'avait pas lu de roman aussi palpitant depuis longtemps - Tous les autres avis sont regroupés chez Bob !

5 avril 2010

Un brillant avenir, Catherine Cusset

unbrillantavenir"Entourée de ces jeunes Américains qui parlent anglais entre eux et s'adressent à elle affectueusement, Helen se rappelle l'époque où son fils, étudiant de licence à Harvard, amenait ses amis à dormir dans le NewJersey après une fête tardive à Manhattan, sans même prévenir ses parents. Elle se réveillait le dimanche matin et trouvait sa maison, tel le château de la Belle au Bois dormant, peuplée de jeunes gens endormis sur les canapés du salon, sur la moquette de la salle à manger, ou au sous-sol. Elle en était heureuse. Tandis qu'ils lèvent leurs verres aux jeunes mariés rayonnants, elle oublie les mois d'insomnie et d'angoisse. Après tout, peut-être une épouse française n'empêchera-t-elle pas Alexandru d'avoir un brillant avenir."

Elena est roumaine. Le résultat d'une filiation obscure. Ses parents adoptifs, oncle et tante, seraient peut-être ses véritables parents. Elle n'en sera jamais certaine. En 1958, elle rencontre Jacob, lors d'un bal. Ils tombent éperduement amoureux, mais le jeune homme est juif et les parents d'Elena s'opposent au mariage. Le couple passera outre et quittera après la naissance de leur enfant la roumanie pour Israël, puis pour les Etats-Unis.
Devenu jeune-homme, Alexandru, leur fils, rencontrera à son tour l'amour, en la personne d'une jeune française, Marie, qu'il épousera finalement lui aussi malgré le désaccord de ses parents. En effet, Elena, qui se fait appeler désormais Helen, tremble devant cette belle-fille étrangère qui lui semble un danger pour l'avenir de son fils et pour l'équilibre de leur famille. Mais cette inquiétude est-elle fondée ?

J'ai beaucoup lu autrefois Catherine Cusset, notamment son roman Le Problème avec Jane qui a reçu en 2000 le Grand Prix des Lectrices ELLE. Il y a eu également ses autres écrits, plus autobiographiques, comme par exemple La Haine de la famille, Amours transversales, En toute innocence, que j'avais beaucoup aimés à une époque... Je me souviens être sortie d'une librairie de Nantes, il y a quelques années, un paquet de Folio blancs signés Catherine Cusset dans les mains. Un brillant avenir se classe pour moi dans la même veine que Le Problème avec Jane, nous y rencontrons la dimension de conteuse de l'auteure.
Sans disséquer particulièrement ce roman, je dirais que j'en ai apprécié ici les aspects historiques, cette incursion profonde dans une Roumanie inconnue, isolée. J'ai aimé le caractère d'Elena jeune, et ses contradictions d'adultes, le personnage de Marie aussi. L'auteure sait, avec talent, pointer du doigt les terreurs de mère, le bouleversement des moeurs entre deux générations que tout semble opposer. Il y a beaucoup de promiscuité dans ce livre, des canapés que l'on déplie pour un soir, ou quelques mois, de la dignité et de la fierté que l'on ravale douloureusement.
Un moment de lecture profond et intéressant.

bouton3 Note de lecture : 4/5 - Folio - Février 2010 - 7.10€

Biblioth_que_et_LALCe titre a reçu le Prix du Goncourt des Lycéens 2008

Solenn a apprécié ce "très beau portrait de femme" - Keisha a trouvé cet écrit plus plat que les autres romans de l'auteure - Un roman vraiment très réussi pour Cuné - Anna Blume est un peu déçue - Ce roman a parlé à Leiloona - Toutes les autres lectures sont chez BOB...

4 avril 2010

Bastien Vives

Aujourd'hui, pas d'oeufs de Pâques sur ce blog, non, mais de la couleur, oui.

Mes_images21

Pourquoi ? Parce que ces deux albums ont croisé mon chemin mercredi dernier, bien en vue sur un présentoir de ma bibliothèque, et que tiré en avant par petit-dernier bien pressé, ni une ni deux, je les ai embarqués.
Bel Gazou m'avait déjà alléchée avec ses billets, notamment celui sur Dans mes yeux très évocateur...et puis Le goût du chlore a été beaucoup lu sur la blogosphère...alors je voulais y jeter mon propre oeil acéré, pour voir si moi aussi j'allais être conquise.
Et bien, bien m'en a pris, j'ai bien fait. Déjà, l'objet est joli, épais. Il y a du silence dans les vignettes, des regards, beaucoup d'élégance, des mouvements proches du réel, des rencontres, des ruptures, des départs, et encore du silence. L'action de l'un se déroule dans une piscine, tous les mercredis. L'autre raconte une rencontre étudiante, entre BU, partiels et sorties... J'ai eu vrai coup de coeur pour ces deux albums !

En plus, lorsque l'on voit le minois tout jeune de l'auteur en cherchant des images sur un moteur de recherche bien connu, on se dit qu'il y a aussi énormément de maturité dans ces pages, et du talent précoce. Voilà, j'aime beaucoup.

Casterman - 2008, 2009

http://bastienvives.blogspot.com/

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