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Les lectures d'Antigone ...
Ardoise magique

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Ben oui, à mon tour, j'ai craqué !

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emotion
25 avril 2009

Café viennois, Michèle Halberstadt

caf_viennoisClara part en voyage avec sa mère Frieda, mais pas n'importe où, à Vienne.
Leur séjour est un retour vers l'enfance de cette dernière, vers le passé, un avant-guerre enchanteur où petite fille juive elle parcourait les rues de la ville. C'est également un moment de reconstruction pour les deux femmes. Clara est venue pour ne pas laisser sa mère seule, mais on ne sait pas réellement qui est là pour soutenir l'autre, quel bras est le plus fort...
Vienne, accueillante et froide, Vienne versatile et grande, Vienne et ses cafés protecteurs...conduira chacune à la rencontre d'elle-même.

Café viennois est un roman qui chemine tout doucement entre des éclats de souvenirs... La fuite de Vienne de Frieda et des siens, l'extermination des juifs, tout est évoqué sans pathos.
Le présent panse un passé où se mêlent mélancolie et amour des siens. Le passé panse des blessures à vif, plus récentes, en les placant en perspective...
J'ai aimé l'atmosphère de ce livre, ses personnages, la manière très prosaïque de Frieda de vivre les grands moments de l'Histoire. J'ai aimé partager la douleur de Clara et la manière profonde dont elle arrive à l'annihiler, la transcender.
Michèle Halberstadt a une jolie écriture, érudite et simple, sans grands effets de style, pleine de charme. Un roman qui ne laisse pas indifférent et qui, mine de rien, inscrit des traces en soi...

"Partir avec sa mère. Quelle drôle d'idée. Clara voyageait toujours seule. Une interview. Une valise. Une chambre d'hôtel. Un entretien à faire, un papier à écrire. Une journée à passer pour se sentir en vie.
Partir avec sa mère. Faire l'égoïste. Se comporter comme si elle était seule, célibataire. Oublier mari et enfant. Tenter de se défaire un instant du poids qui l'étouffe. Essayer de trouver les mots. Avoir le courage de se mettre à nu devant le seul être au monde qui ne la jugera pas."

bouton3 Note de lecture : 4/5

ISBN 978 2 253 12388 0 -5.50€ - 01/08

Un grand merci à Nanne pour le prêt !! - La lecture de Sylvie - Celle de Clarabel

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20 avril 2009

Le coeur cousu, Carole Martinez

le_coeur_cousuheart "Ce qui n'a jamais été écrit est féminin"

Frasquita Carasco a reçu, à l'adolescence, et de sa mère, une boîte en bois magique qui la fit couturière et des prières qui la firent un peu sorcière.
Ses dons transmettent aux tissus qu'elle touche une vie particulière. Marié à un homme sans cervelle qui la joue un beau soir pour un combat de coq, elle partira sur les routes avec à sa suite ses filles et son garçon aux cheveux rouges. Fuyant toujours plus au sud, semant derrière elle l'amour et la folie des hommes, elle s'arrêtera finalement dans un village d'Afrique du Nord. Là, son talent de couturière et les sortilèges qui entourent sa famille, trouveront en la dernière née, Soledad, une narratrice, et la main de l'apaisement...

Têtue comme je peux l'être parfois, j'ai lutté bêtement dans les premières pages contre l'envoûtement de ce roman. Je suis quelquefois comme cela, décidée à ne pas me laisser avoir par un livre qui a déjà fait l'unanimité. Mais, peine perdue, ce récit là m'a prise par les sentiments, les émotions et tout le reste. Aucun risque d'y échapper.
Alors oui, Le coeur cousu est un conte dans tout ce que ce genre peut avoir d'irréaliste et de lyrique ; mais non, rien de trop ici, que de la féminité, des corps qui aiment, désirent et souffrent, et de la vie qui avance cahin-caha, sans fioritures ni enjolivements, dans la lutte. Ce livre fait battre le coeur et ne demande au lecteur qu'à se taire, devant tant de simplicité apparente dans le style et devant tant de délicatesse dans la broderie du texte.
Et puis, et puis, j'ai trouvé un peu de l'
Antigone de Bauchau dans l'errance de cette femme, ce qui me l'a rendue encore plus particulière...

Un extrait du cahier de Soledad...
"Il me faut t'écrire pour que tu disparaisses, pour que tout puisse se fondre au désert, pour que nous dormions enfin, immobiles et sereins, sans craindre de perdre de vue ta silhouette déchirée par le vent, le soleil et les pierres du chemin.
O mère, il me faut ramener des profondeurs un monde enseveli pour y glisser ton nom, ton visage, ton parfum, pour y perdre l'aiguille et oublier ce baiser, tant espéré, que jamais tu ne m'as donné !
Il me faut te tuer pour parvenir à mourir...enfin.
Mon lumineux cahier sera la grande fenêtre par où s'échapperont un à un les monstres qui nous hantent.
Au désert !"

bouton3 Note de lecture : 5/5

ISBN 978 2 07 078305 2 -23€ - 02/07

broderie

Ce titre voyage en grand format grâce à Florinette, merci !! - La lecture de Sylvie - Celle de Dda chez Biblioblog - Celle de Clarabel - Ici, l'auteure reçoit avec surprise et émotion un prix pour ce roman - Pour Sylire c'est un coup de coeur - Leiloona crie au génie - Bellesahi l'a dégusté - Pour Amanda, il est juste superbe - La fiche de lecture du CNL - Pour Gambadou, c'est un coup au coeur aussi - Bel Gazou a ressenti un peu d'effroi - Et Aifelle a salué cet hommage aux femmes... (désolée pour les avis que j'oublie !)

16 avril 2009

La Reconstruction, Eugène Green

LA_RECONSTRUCTIONDans La reconstruction, il est question de mémoire...
Nous sommes à Paris, en 2003. Jérôme Lafargue, professeur de littérature française à la Sorbonne, est contacté par un inconnu à son domicile, un Allemand, lui-même professeur d'histoire. Ce dernier a découvert des documents chez son père qui remettent en cause son identité, le déclarant mort peu après sa naissance. Au milieu de ces papiers intimes, se trouvait également la photo de Jérôme et de sa femme Jana, prise trente-cinq ans plus tôt alors qu'ils venaient tout juste de se rencontrer. Jérôme se souvient avoir effectivement été hébergé quelques nuit par un dénommé Wenzel Launer, à Munich, en 1968. Pressé par ce fils en plein questionnement de découvrir dans sa mémoire le lien qui le lierait à eux, Jérôme mène une enquête au fond de ses souvenirs. Devenu père aujourd'hui d'un grand garçon indépendant et le fils d'un homme dont la mémoire est de plus en plus emmêlée, il constate très vite combien ce cheminement l'aide à mieux comprendre et apprécier son présent...

Eugène Green est habituellement metteur en scène et cinéaste, La Reconstruction est son premier roman. Et on reconnaît facilement cette patte là, indéniable, dans la focalisation choisie par le narrateur, distante et exterieure aux pensées des personnages. Cela aurait pû donner au texte beaucoup de froideur mais ce n'est pas le cas, juste un sentiment particulier d'étrangeté. Ce sentiment dépassé, et grâce aux morceaux du journal que Jérôme tient, on entre assez vite dans un récit bourré d'émotions. Il faut aller au bout de ce court roman pour en apprécier toute la richesse, mystique et romanesque. Un bien joli moment de lecture.

Un extrait...
"Jeudi 10 avril
Je pense au sonnet grincheux d'Alvaro de Campos.
Si aujourd'hui j'existe, c'est par le souvenir de sensations que j'emmagasine depuis cinquante quatre ans, voire, car j'ai parfois cette impression, depuis bien plus longtemps encore. Les sensations qui ne contribuent pas à mon sentiment actuel d'existence, je les ai abandonnées en route. Ma mémoire active n'est pas ma réalité, mais la métaphore que j'ai construite pour me faire voir ce que je pense être.
Hier matin un homme m'a prié de lui construire, à partir de ce même fond, une métaphore de ce qu'il est. Sa demande nous met tous les deux devant un abîme effroyable."

bouton3 Note de lecture : 4.5/5

ISBN 978 2 7427 7688 7 - 18€ - Août 2008

Laurence, sur Biblioblog, a un avis plus réservé - tandis qu'Ariane a écrit sur ce livre un billet tout en émotion, que je partage (voir la deuxième partie de son article)

7 avril 2009

Le tiroir à cheveux, Emmanuelle Pagano

le_tiroir___cheveuxVoici comment Emmanuelle Pagano explique le projet de ce roman, en quatrième de couverture...
"Il ne fallait pas parler de ma voisine, même dans son dos. Il ne fallait pas lui parler non plus. Elle n'avait pas demandé la permission d'être enceinte. D'ailleurs, elle faisait plein de choses sans autorisation. [...]
Je regardais le fils de ma voisine, tout de travers dans sa poussette, les orbites pleines de soleil, en me demandant quel interdit l'empêchait de bouger, de voir, d'entendre, de parler, de lever une main pour s'essuyer la bouche. Je regardais sa mère et je l'admirais en cachette. Je l'admirais d'avoir fait ça, un gosse défendu qui bavait et coinçait tout le ciel dans ses yeux. J'avais honte aussi parce que le pauvre. J'ai écrit cette histoire sans aucune autorisation, même pas la sienne, même pas celle de sa mère, juste pour dire en retard il est beau ton fils [...]."

Le tiroir à cheveux c'est cela, l'histoire d'une femme, "cette voisine" imagine-t-on, mère très jeune d'un enfant différent, Pierre, qui a à présent cinq ans.
Il est parfois difficile de comprendre cette femme/enfant/narratrice qui semble subir les évènements plus qu'elle ne les maîtrise, mère à nouveau d'un autre enfant, Titouan, presque par mégarde, sans y penser non plus cette fois-ci encore, trois ans plus tard. Difficile aussi, de ne pas lui trouver du courage, de ne pas porter avec elle le corps lourd de son enfant immobile dans les escaliers qui mènent à leur appartement, de ne pas fondre devant l'amour qu'elle met dans chacun de ses gestes, dans sa manière de leur passer la main dans les cheveux, de les laver, de les nourir. Alors, j'ai fondu, j'ai aimé l'écriture, et j'ai été touchée de reconnaître au détour des pages dans le portrait d'une petite voisine/lectrice celui de l'auteure...à moins que je ne me trompe ?

"La lune pleine, je ne la supporte pas. Elle m'indispose. Je me sens maladroite. Je la regarde. Elle ne bouge pas. Je me sens coupable, même si les gens se taisent. Ne rien dire c'est toujours parler de Pierre. Pierre c'est un bout de lune. Je n'ai jamais rien dit à personne. Personne ne m'a jamais rien dit.
Je me doute qu'on en parle, de Pierre, mais dans son dos, dans le mien."

bouton3 Note de lecture : 4/5

ISBN : 978 2 84682 084 4 - 15€ - 08/2005

La lecture de Sylvie (passion des livres) - Celle de Lily - Le choc de Laure - Pour Anne c'est un coup de coeur - La fiche du livre sur le blog de l'auteure

Autre titres lus : Les mains gamines - Le guide automatique - Les adolescents troglodytes

Emmanuelle Pagano sur ce blog et sur son site : http://lescorpsempeches.net/corps/

3 avril 2009

L'autre moitié du soleil, Chimamanda Ngozi Adichie

l_autremoiti_dusoleil"Le monde s'est tu pendant que nous mourions"

L'autre moitié du soleil déroule sa trame durant la guerre Nigeria-Biafra qui eut lieu entre 1967 et 1970. Les faits sont réels mais les personnages fictifs. Apparaît tout d'abord dans le récit de Chimamanda Ngozi Adichie Ugwu, jeune boy de treize ans, venu servir un maître intellectuel aux idées engagées, Odenigbo. Puis, nous suivons le destin de deux soeurs jumelles, pourtant dissemblables, Olanna, belle et amoureuse de Odenigbo, et Kainene, plus sèche et ironique, qui nourrira une liaison secrète avec un journaliste blanc, Richard. C'est le parcours de ce groupe, à l'avenir privilégié tout tracé, que l'auteure nous conte, un parcours que l'indépendance du Biafra (symbolisée par un demi-soleil jaune cousu sur les manches des soldats) et la guerre viendront foudroyer...

J'ai eu de la peine à entamer ce lourd roman puis je me suis laissée happer avec force par ses personnages, habilement peints, et une intrigue savamment menée. Bien entendu, il est question de la guerre, de ses exactions, de ses horreurs. Bien entendu, il est question de la mort, dans ce qu'elle peut avoir de plus injuste et de plus sordide. Mais ce n'est pas ce que je retiendrai de ce livre. Je retiendrai le portrait de deux femmes fortes aux caractères différents, Olanna et Kainene, qui m'ont semblées à moi terriblement vivantes, bien que fictives. Je retiendrai la richesse du personnage d'Ugwu, sauvé par les mots, la lecture et l'instruction. Je retiendrai la tendresse qui lie chacun d'eux, entre eux, précieuse. Un roman qui nous parle avec subtilité des guerres oubliées du monde, mais aussi de la fragilité de la vie. Un livre avec de l'émotion au bord de la lecture.

Un extrait...
"Edna avait un rire doux. Elle enseignait la musique, passait des disques de jazz un peu trop fort, faisait des côtes de porc bien tendres et parlait souvent de l'homme qui l'avait quittée une semaine avant leur mariage à Montgomery et de l'oncle qui s'était fait lyncher quand elle était petite.
"Tu sais ce qui m'a toujours stupéfaite ? disait-elle à Olanna comme si elle ne lui avait pas déjà raconté la veille. Que des Blancs civilisés mettent leurs jolies robes et leurs chapeaux et se rassemblent pour regarder un Blanc pendre un Noir à un arbre."
Et elle riait de son rire doux en tapotant ses cheveux, qui avaient le brillant gras du fer à défriser. Au début, elles ne parlèrent pas d'Odenigbo. Ca faisait du bien à Olanna d'être avec quelqu'un qui n'ait aucun rapport avec le cercle d'amis qu'elle avait partagé avec Odenigbo. Et puis, un jour, alors qu'elle accompagnait en chantonnant la chanson de Billie Holiday, My Man, Edna demanda :
"Pourquoi tu l'aimes ?"
Olanna leva la tête. Elle avait l'esprit vide.
"Pourquoi je l'aime ?"
Edna leva les sourcils en articulant muettement, sans les chanter, les paroles de Billie Holiday.
"Je ne pense pas que l'amour ait une raison, dit Olanna.
- Bien sûr que si.
- Je crois que l'amour vient en premier et que les raisons suivent. Quand je suis avec lui, j'ai l'impression que je n'ai besoin de rien d'autre." Olanna fut surprise par ses propres paroles, mais cette troublante vérité lui donna soudain envie de pleurer."

bouton3 Note de lecture : 4/5

Un livre lu dans le cadre du grand prix des lectrices de BOOKPAGES 2009
Catégorie Roman

ISBN 978-2-07-077610-8 - 25 € - 09/2008 

La lecture d'Amanda -

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1 avril 2009

Ma vie balagan, Marceline Loridan-Ivens

maviebalaganMarceline Loridan-Ivens, ex-Rozenberg, nous raconte sa vie à l'aube de ses 78 ans.
Ses souvenirs forment un tas dans lequel elle pioche quelques fragments pour nous transmettre leurs images avec finesse et dignité... Car juive, elle sera obligée de fuir la france occupée, avec sa famille, lorsque les menaces se préciseront. Juive, elle sera découverte et déportée à Auschwitz-Birkenau. Juive, elle sera libérée physiquement, mais prisonnière pendant longtemps d'une parole tronquée, lourde de ce que les autres ne veulent pas entendre, pourtant marquée, tatouée, pour toujours.
Femme engagée, passionnée, membre du PC, elle rencontrera en Joris Ivens le grand amour et une carrière dans le cinéma.

J'ai beaucoup aimé ce témoignage d'une femme hors du commun, combative, militante et forte. L'amitié de l'auteure avec Simone Veil (spécifiée en quatrième de couverture et en bandeau) n'est qu'un détail du récit - la politicienne y passe, rapidement, telle un fantôme à peine aperçu - et cela suffit. Non, l'intérêt du livre est bien ailleurs, dans la mémoire esquissée d'une époque, dans tout ce que l'on devine derrière ces silences qui jalonnent l'histoire de ces années de camp terribles, dans toute l'ardeur de cet après-guerre où tout était à reconstruire et à faire, différemment.
Le seul reproche que je pourrais faire à ce livre est son manque de densité. L'écriture de ce document m'a tellement plu qu'il ne m'aurait pas été désagréable d'en lire plus. Mais il y a ici une voix, indéniable, celle de Marceline Loridan-Ivens sans doute, celle peut-être aussi de la journaliste qui l'a aidée dans son écriture, Elisabeth D. Inandiak. Même conjuguée au pluriel, elle se dévoile bien belle.

Un extrait...
"C'est un rêve.
Je suis dans une ville, je ne trouve plus mon hôtel. J'ai une valise à la main. Pourquoi ai-je une valise ? Je ne sais pas. Je ne connais pas la ville. J'arrête des gens, sur la place, je leur parle, ils ne comprennent pas ma langue, je ne comprends pas la leur, ils rient, ils s'en vont. Je me perds de plus en plus en cherchant mon chemin. Je grimpe la pente d'une énorme montagne en tirant cette valise, et plus je monte, plus la valise est lourde. Personne ne m'aide...[...]

Je vis sous le signe des valises. Les valises qu'on emporte rapidement. Celles que nous avons dû abandonner à l'arrivée du camp, celles qui se sont accumulées à Auschwitz, avec leurs étiquettes et leurs noms. Les valises que l'on fait pour partir avec un homme, longtemps, dix-sept valises. Je croule sous les valises. Je dois toujours me retenir d'en acheter."

bouton3 Note de lecture : 4/5

Un livre lu dans le cadre du grand prix des lectrices de BOOKPAGES 2009
Catégorie Document

ISBN 978-2-221-10658-7 - 19 € - 10/2008

La lecture d'Annie -

27 mars 2009

Dormir ensemble, Hervé Brunetière

dormir_ensemble"Une partie, ou la totalité, de ce récit est vraie. Il y a une vérité de ce récit. Il y a une vérité de cette nuit. Mais est-ce que la vérité du récit recouvre la vérité de cette nuit ?

Je ferme les yeux et c'est cette nuit. Le corps de cet homme que je ne connais pas. Son corps à elle. A côté dans le lit.

On a dormi ensemble...mais il ne s'est rien passé entre nous."

Un homme raconte cette nuit où il n'était pas là, cette nuit où celle qu'il aime a dormi contre un autre homme. Il se demande pourquoi elle le lui a dit, pourquoi cet aveu. Il imagine la scène, les effleurements, cette affreuse intimité du sommeil partagé. Il lutte contre le malaise et la jalousie qui envahit son être, son corps et son imagination.

"Ils ont dormi tous les deux à côté toute cette longue nuit. Ils étaient si proches. [...] Dans la tiédeur ou la chaleur des draps, leurs odeurs se mêlent, s'arrangent entre elles, construisent une nouvelle odeur, une odeur unique, inoubliable, l'odeur de cette nuit. L'odeur de cette nuit à eux qui est la mémoire de cette nuit à laquelle je n'aurais jamais accès.

C'est une nuit de juin, je crois."

Un grand merci à Anne pour la découverte de ce court récit, encore une belle surprise des éditions de l'escarbille !! J'ai lu ce livre d'un trait, envoûtée. Il m'a peut-être manqué de la densité, comme une impression de "pas assez", mais j'ai aimé l'émotion qui s'est dégagée des phrases de Hervé Brunetière, une quête à poursuivre, donc.

bouton3 Note de lecture : 3.5/5

ISBN : 2 913399 08 8 -6€ - 2004 - L'escarbille/Nantes

La lecture de Clarabel

Chez le même éditeur, ma lecture Des gourmandises sur l'étagère de Françoise Moreau, un coup de coeur !

6 mars 2009

Sans blessures apparentes, Jean-Paul Mari

sansblessuresapparentes"Plus la guerre menée a été longue et sauvage, plus le sevrage sera brutal. Soudain, tout s'arrête. Le jour succède à la nuit. Autour d'une nappe blanche, les Présidents des deux camps apposent leurs élégantes signatures à la plume au bas d'un traité et décident que la guerre est finie, le chaos révolu et le crime à nouveau immoral. Ainsi, d'un coup, d'un seul, il faudrait tout oublier ! Redevenir doux comme un agneau, père attentif, mari aimant, citoyen modèle, bien à l'heure le dimanche pour la partie de boules à la sortie de la messe ou de dominos après la mosquée. Le héros sur le front, l'ancien tueur, qualifié jusqu'ici d'avant-garde de la patrie en danger, est prié de déposer les armes et d'enfiler de toute urgence son costume trois pièces de citoyen lambda pour reprendre sa place dans la comédie humaine."

Jean-Paul Mari est grand reporter, et ce depuis de longues années. Il parcourt le monde en quête de papiers, suit les guerres qui éclatent de partout, qui massacrent, qui tuent, qui torturent. Un jour, à Bagdad, logé dans un hôtel réservé à presse, il assiste aux dégâts que provoque un obus envoyé par les alliés, et plus particulièrement à la mort d'un de ses confrères, fasciné par la tâche blanche et nacrée qui a remplacé son ventre. Il ne sait pas que le mal est entré en lui, ce mal qui ronge ces hommes que la guerre rend fou, ce mal devenu sujet tabou, couvert par les décorations et les éloges héroïques... Sans blessures apparentes est le résultat d'une enquête de longue haleine, menée contre l'horreur pour la guérison et la légèreté...

Contre toutes attentes, j'ai beaucoup aimé ce livre, presque un récit d'utilité publique. Jean-Paul Mari a un talent évident, celui d'écrire remarquablement bien, celui aussi de nous transmettre son sujet sans lourdeurs, avec imprégnation. Ecris comme un roman, hanté par des images fantômes, ce récit est une quête, une quête vers le bonheur, vers les autres, vers la paix, mais aussi une quête de soi. A travers les portraits de guerriers naufragés qu'il nous dresse, c'est un peu l'humanité perdue dont Jean-paul Mari nous parle, et les solutions pour la sauver nous paraissent soudain si simples et si lointaines à la fois... Un documentaire, riche en émotions et en subtilité, qui m'a passionné.

"- On en sort plus riche ?
- Infiniment.
- Après avoir, hélas, perdu sa légèreté d'antan...
- Grossière erreur.
- Mais enfin, le temps de l'innocence est fini, non ? [...]
- L'innocence dont vous parlez n'est pas la légèreté.
- Je ne comprends pas.
- En revisitant son histoire, le traumatisé, guéri, a renoncé à sa névrose mais il en a profité aussi pour dénouer des noeuds anciens...
- Qui entravaient sa vie ?
- Oui. Cette "innocence" dont vous parlez il la payait cher.
- Alors quand la cure réussit...
- C'est un homme qui a retrouvé sa liberté. Plus léger qu'avant. Beaucoup plus léger !"

bouton3 Note de lecture : 4/5

Un livre lu dans le cadre du grand prix des lectrices de BOOKPAGES 2009
Catégorie Document

ISBN 978-2-221-10731-7 - 20 € - 10/2008

La lecture d'Enna - Celle d'Annie

4 mars 2009

Dis oui, Ninon - Maud Lethielleux

disouininonnouveau 
                    ...sort aujourd'hui en librairie !

Ninon est une petite fille espiègle, chez qui les mots sont un peu en désordre, mais gardent un sens naïf et vrai. Ninon aime sa mère Zélie, sa jeune soeur Agathe et son père Fred. Un peu déboussolée par un monde d'adultes fait d'adolescents devenus parents trop jeunes, qui se séparent et qui mentent, Ninon décide de rester auprès de son père et de le soutenir dans un rêve un peu fou, construire une maison de bric et de broc et mener un élevage de chèvres...

C'est la voix de Ninon que nous entendons d'emblée en ouvrant ce premier roman de Maud Lethielleux, la voix d'une enfant de neuf ans qui prend des petits bouts de monde au creux de ses pensées pour en faire un puzzle instable qui ressemble à sa vie. Ninon est heureuse, et bien plus que la plupart des adultes elle assume ses choix. Elle veut vivre avec son père, l'aider à la ferme, aller le moins possible à l'école, là où on la traite de guenon, traire les chèvres, serrer sa mère contre elle mais pas L'Autre avec qui elle vit à présent, dormir avec sa petite soeur mais la trouver bien plus jolie qu'elle, différente.
La grande force de ce récit est de garder le même ton du début à la fin, un ton qui donne du poids aux mots, les rend crédibles et denses. J'ai aimé cette qualité d'écriture là et cette petite fille, très attachante qui cherche à se construire un monde confortable et rassurant au milieu du chaos.
Bravo Maud, et grand merci !

Un extrait...
"Elle me pose des questions. Je n'ai pas envie de mentir, alors je me contente de hocher la tête, elle me dit qu'on va bientôt avoir les clés de sa maison, elle a fait un emprunt mais ça va aller, elle aura une aide de la Kaffe. Je sursaute dans moi-même : pourquoi madame Kaffe fourre son nez partout et qu'elle s'occupe de nous ? Pourquoi on est des assistés, on ne sait pas se débrouiller ? Pourquoi elle nous achète des robes cerises, madame Kaffe ?
Je vois bien qu'on me cache quelque chose de grave, un secret. Madame Kaffe est peut-être de la famille du côté des coeurs de Chine, quelqu'un de très riche qui nous surveille en nous donnant des sous, ou alors on vit dans une sorte de prison spéciale et elle s'occupe de tout le monde, et nous, parce qu'on est des enfants, on ne sait pas tout ça. Si ça se trouve, madame Kaffe est une directrice de prison, comme les directrices d'école mais en pire, ou alors ce n'est pas du tout ça, c'est juste une vieille dame gentille qui nous a pris sous son aile, une sorte de poule."

bouton3 4.5/5

ISBN : 978-2-234-06230-6 - 17.50 € - 03/09

Le blog de Maud Lethielleux - La lecture de Lily - Celle de Cathulu
Clarabel en parle aussi

"Dis oui, Ninon" part en voyage !
Si cela vous intéresse, merci de me contacter en cliquant en haut à droite sur "contactez l'auteur".

20 février 2009

L'étrange histoire de Benjamin Button

benjamin_button

Quel étrange film que cette étrange histoire... Quelle étrange idée a eu l'auteur du livre, dont ce film est l'adaptation, que de créer ainsi un enfant né déjà vieux, un monstre, appelé de toutes évidences à mourir, et qui survit et qui rajeunit sans cesse... Quelles étrange impression de malaise que de voir ce personnage vieux, à la limite du repoussant, devenir un homme plus jeune, devenir Brad Pitt...

Cette fresque implacable parle du temps, du temps qui passbenjamin_button2e, qui se joue de nous, celui que l'on perd aussi, irremplacable... Je ne saurais dire si j'ai aimé tant que cela voir ce film de bout en bout, je n'en suis pas si sûre. Et pourtant, je sais que je ne l'oublierai pas, que certaines images resteront gravées dans ma mémoire longtemps. La fin a beaucoup touché mon coeur de mère...
Ah oui, bien sûr, les métamorphoses sont d'un réalisme extraordinaire.

Quelques images...


L'Etrange histoire de Benjamin Button - Teaser / BA [VF]

Des opportunités de cinéma, grâce à une amie, et hop voilà une nouvelle rubrique qui prend forme, car à présent je vais au "cinéma...parfois".

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Les lectures d'Antigone ...
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