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Les lectures d'Antigone ...
Ardoise magique

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Ben oui, à mon tour, j'ai craqué !

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4 décembre 2011

Tout passe, Bernard Comment

tout passe"Que reste-t-il d'une vie ? Qu'est-ce qui, une fois éliminés les parce que quoique donc en effet néanmoins, reste d'une vie ? De la subtile tessiture d'une vie ? Très peu de choses. Quelques moments forts, trois, quatre, cinq. Vingt peut-être, dans les existences trépidantes. On vit, au jour le jour, dans l'exagération des petits évènements, j'ai fait ceci, pas fait cela, et telle démarche à entreprendre, et du retard à rattraper, des urgences à résoudre, des engagements à honorer, mais au décompte final, rien ou si peu de toutes ces années, et même décennies, qui restera."

Dans les nouvelles de Tout passe, le temps s'est arrêté, et le passé n'est plus qu'un agrégat d'évènements parfois indécents souvent révolus qui n'ont pas prise sur un présent aujourd'hui vide de sens. Les personnages de Bernard Comment sont plus ou moins âgés, ont eu des enfants, des amours, la passion du livre, ou connu le succès, mais peu importe... à l'heure où l'auteur écrit ces lignes qui cloueront pour toujours leur destin plus rien ne compte que l'état de flottement dans lequel ils se retrouvent.

Voici un livre dont j'attendais beaucoup, j'aime les nouvelles, et puis il a eu un prix ayant déjà récompensé des auteurs aimés. Pourtant, malgré ses qualités littéraires évidentes, je dois avouer qu'il m'a au final un peu déçue. J'en ai apprécié l'écriture, très fine, mais moins cette ambiance déprimante, sombre et fataliste, qui parcourt les divers petits récits. De plus, et même si il est agréable que pour une fois une nouvelle ne présente pas sa chute en dernière phrase de façon systématique, quelques indices supplémentaires à l'intrigue m'auraient parfois permis de simplement comprendre... loin du dénouement obscur et esquivé qui nous est souvent présenté. Zut et flûte. Vous y trouverez cependant, pour les adeptes, de bien jolies ambiances glauques et solitaires, et des rideaux démodés tirés sur des meurtres silencieux.

Christian Bourgeois éditeur - 13€ - Avril 2011 - Merci ma bibli !!

(Prix Goncourt de la nouvelle 2011)

Une tentation contractée sur le blog de Enfin livre 

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28 février 2012

Auprès de moi toujours... en DVD

Adaptation cinématographique du livre éponyme de Kazuo Ishiguro (mars 2006, éditions des deux terres), ce film relate l'histoire d'une bande d'enfants, élevés dans un pensionnat de la campagne anglaise dans les années 80. Ils découvrent un beau jour le secret qui va guider leur avenir, et leur rôle réel dans la société qui les entoure.
Un film d'anticipation bluffant et esthétiquement parfait, qui allie avec art angoisse et poésie. La naïveté et la grâce des premières images ne préparant pas au drame qui attend au final Kath, Ruth et Tommy. Bizarrement, le texte écrit ne me disait rien. Le hasard a voulu que je découvre la version filmée en premier. Je ne regrette pas et je conseille sans réserves.

auprès de moi toujours


NEVER LET ME GO : BANDE-ANNONCE VF HD

Un DVD sorti en Août 2011

8 mai 2012

Stoner, John Williams

stoner"Cet amour de la littérature, de la langue, du verbe, tous ces grands mystères de l'esprit et du coeur qui jaillissaient soudain au détour d'une page, ces combinaisons mystérieuses et toujours surprenantes de lettres et de mots enchâssés là, dans la plus froide et la plus noire des encres, et pourtant si vivants, cette passion dont il s'était toujours défendu comme si elle était illicite et dangereuse, il commença à l'afficher, prudemment d'abord, ensuite avec un peu plus d'audace et enfin... fièrement."

William Stoner est né pauvre, dans une modeste ferme du Missouri, à la fin du XIXème siècle. Il suit alors ses études avec application mais ne doute pas que son destin soit de continuer à aider plus tard ses parents à tirer de cette terre ingrate de maigres fruits. Contre toutes attentes, et suivant ainsi les conseils du conseiller rural du village, ces derniers l'incitent à s'inscrire à l'université afin d'obtenir un diplôme en agronomie. Mais c'est vers la littérature que Stoner se dirigera finalement, et d'amitié en soutiens, se retrouvera finalement professeur dans cette université qui lui semblera très vite être son havre, son refuge, le centre de tout. Car Stoner ne trouvera par ailleurs guère de plaisir dans son mariage avec Edith, une jeune femme éthérée, hystérique et fragile, ni avec sa fille Grace, que sa mère n'aura de cesse de malmener...

Il faut dire avant tout - et puis vite oublier - que ce roman est paru pour la première fois en 1965 puis traduit dernièrement par Anna Gavalda. Car, en premier lieu, il est évident que ce roman est très moderne et, en deuxième lieu, bien éloigné de l'univers habituel de la traductrice, quoique magnifiquement traduit (dans la limite de ce que je suis capable de juger, bien entendu). On pense aussi à l'univers de David Lodge en lisant les premiers chapitres, mais John Williams évite heureusement toute caricature alors on fait fie de toutes références et on apprécie.
J'ai beaucoup aimé ce roman, suivre William Stoner de son enfance à sa mort. Voici un personnage très en retrait, anti-héros par excellence, qui observe le monde avec recul, les deux guerres qui ont embrasé le siècle dernier, et se plonge avec fougue et enthousiasme dans la littérature et l'enseignement. Il connaîtra aussi quelques désillusions, rancoeurs et outrages, mais également l'amour avec un grand A. Un personnage complet qui m'a rappelé quelques vieux professeurs rencontrés autrefois à la Fac.
Une lecture en forme de bain de jouvence donc, mais aussi un hymne à la littérature qui ne m'a pas laissée indifférente, un coup de coeur ! (et oui encore !)

 heart  Editions Le Dilettante - 25€ - 27 Août 2011 - Merci ma Bibli !!!

D'autres lectures aussi enthousiastes... Laure et Théoma (même extrait cité d'ailleurs)
Je l'avais noté en tout premier chez Cuné !!

13 janvier 2008

La répudiée, Eliette Abécassis

Résumé (extrait de la quatrième de couverture) : "Au premier regard, Rachel a aimé Nathan, le mari qu'on lui destinait. Et c'est avec bonheur qu'elle a accepté son destin de femme pieuse dans ce quartier traditionaliste de méa Shéarim, à Jérusalem, où elle a grandi. Mais au fil des années se dessine le drame qui la brisera : le couple n'a pas d'enfant. Et la loi hassidique donne au mari, au bout de dix ans, la possibilité de répudier la femme stérile."

Avis d'Antigone : Déjà, et avant tout, je trouve la couverture de la version poche magnifique (détail de Eve ou l'amour en blanc, Sandorfi) ! Et puis, bien sûr, il y a cette histoire, belle et bouleversante. Ce n'est pourtant pas le roman d'Eliette Abecassis que je préfère. Un style peut-être trop simple, à mon goût, mais ce style est également la voix de cette femme, pudique et pieuse, qui exprime, sans pathos, ses sentiments, alors il devient cohérent et évident, à la lecture. Enfin,  il y a ce thème, très fort, celui des lois religieuses, ces lois humaines, si inhumaines, dictées au nom de Dieu, et qui tuent... Alors, il n'y a plus rien à dire, ce roman devient un témoignage universel, et je ne peux qu'être touchée.

Extrait : "Tous les mois, c'est la même chose. Je pleure. Je soupire. J'attends. Que le linge au-dessous de moi ne soit point taché de rouge. Et tous les mois, mon ventre me fait mal. Le sang s'échappe, je saigne, je prie, je pleure. Mes larmes mouillent le mur occidental. Telle une brebis abandonnée, ainsi j'erre dans les rues. Mes paupières tremblent, mes jambes vacillent, mes yeux brillent de douleur. Je regarde autour de moi, je ne vois personne pour m'aider.

Ma mère, qui est la gardienne du mikvé, le bain rituel, a honte de ma stérilité. Chaque mois, je viens me tremper dans l'eau de pluie car, à la fin des sept jours sans tache, la femme doit s'immerger dans le mikvé à la nuit tombée, après que trois étoiles ont été visibles.

Il me semble que j'expie quelque chose. Je souffre, je vomis, je me traîne par terre, je cogne ma tête contre les murs. Toute la journée, je reste couchée. Nathan a trouvé un nom pour les jours impurs. Il me demande quand sera finie "ma maladie". Il n'a pas pas tort. L'impureté mensuelle, c'est la maladie de la femme stérile.

Mais on ne peut devenir pure que parce que l'on est impure. C'est pourquoi la femme, chaque mois, s'élève en se purifiant. Quand tout est fini, je me rends au bain rituel, je me déshabille, et, aidée par ma mère Hanna, je plonge dans le bassin d'eau froide, tête comprise : c'est une naissance.

- Toujours rien ? demande ma mère.

- Toujours rien.

- Cela va bientôt faire dix ans.

- Je sais. S'il le veut, Nathan peut me répudier."

La lecture d'Anne (qui suit le même chemin de lecture que moi...)

Les autres titres lus du même auteur : Un heureux évènement et Clandestin.

13 février 2008

La mare au diable, George Sand

lamareaudiableVoici encore un livre lu dans le cadre de l'

Atelier livres en poche

(Maison Gueffier, La Roche sur Yon)

heart

L'histoire : A à peine trente ans, Germain, laboureur, est veuf depuis deux ans d'une femme qu'il pleure toujours et père de trois enfants, l'aîné vient d'avoir sept ans. Son beau-père, soucieux de son avenir, le presse de chercher une nouvelle femme pour s'occuper de ses petits, et oublier son chagrin. Au départ réticent, Germain finit par accepter l'idée d'aller trouver une prétendante à Fourche. Il doit pour cela traverser une forêt au centre de laquelle se niche une mare. Chargé de Marie, une petite voisine de 16 ans qu'il doit laisser en route, et de son dernier fils, il voyage tranquillement vers ce nouvel amour incertain, mais la forêt lui fait curieusement perdre son chemin, et sa raison...

Mon avis : Ce court roman est une redécouverte. Il m'en restait un souvenir confus de sorcellerie et d'envoûtement, je ne saurais dire pourquoi. En fait, George Sand brosse ici le portrait d'une campagne rude mais belle, où les paysans connaissent l'injustice de voir leur travail nourrir des propriétaires terriens blasés, une prise de position habituelle pour elle mais inhabituelle pour l'époque. Cette histoire est belle, celle d'un amour qui prend ses protagonistes au dépourvu, celle d'une forêt qui protège et fait tourner les têtes, celle d'une mare dont on ne parle jamais, qu'à l'improviste, comme par mégarde. Ce roman nous fait dire une fois de plus, comme bien souvent, que ce n'est ici pas le but du voyage qui importe mais bien le chemin. A lire, bien sûr !

Un extrait : "Germain connaissait le chemin jusqu'au Magnier ; mais il pensa qu'il aurait plus court en en prenant pas l'avenue de Chanteloube mais en descendant par Presles et la Sépulture, direction qu'il n'avait pas l'habitude de prendre quand il allait à la foire. Il se trompa et perdit encore un peu de temps avant d'entrer dans le bois ; encore n'y entra-t-il point par le bon côté, et il ne s'en aperçut pas, si bien qu'il tourna le dos à Fourche et gagna beaucoup plus haut du côté d'Ardentes.

Ce qui l'empêchait alors de s'orienter, c'était un brouillard qui s'élevait avec la nuit, un de ces brouillards des soirs d'automne que la blancheur du clair de lune rend plus vagues et plus trompeurs encore. Les grandes flaques d'eau dont les clairières sont semées exhalaient des vapeurs si épaisses que, lorsque la Grise ls traversait, on ne s'en apercevait qu'au clapotement de ses pieds et à la peine qu'elle avait à les tirer de la vase.

Quand on eut enfin trouvé une belle allée bien droite, et qu'arrivé au bout, Germain chercha à savoir où il était, il s'aperçut bien qu'il s'était perdu [..]."

L'avis des autres participants : Ce roman est un conte, naïf, idyllique, peu réaliste, où les personnages parlent comme des aristocrates (convention de l'époque) !

George Sand a voulu montrer la beauté du monde paysan, malgré la grande pauvreté qui régnait dans les campagnes, les conventions sociales, les supersititions.

bouton3 Note de lecture : 5/5

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21 février 2008

Pitiés, Philippe Raulet

piti_sheart  L'histoire : Une famille, en banlieue parisienne. Le père est au chômage, la mère fait des ménages. Deux grands enfants. Le benjamin, Thomas, a 14 ans, il est solitaire, il écrit des listes, c'est son passe-temps favori. Lili, l'aînée, 16 ans, romantique et rêveuse, prend le train tous les jours, elle aimerait rire plus souvent. Leur mère, elle, voudrait voir la mer, celle de l'affiche collée sur le frigo, elle boit un peu de temps en temps, pour oublier que leur père ne travaille pas et que, par conséquent, ce voyage est impossible... Mais un soir, le père pose des billets sur la table, ils partiront bientôt, il a trouvé l'argent, on ne veut pas savoir où, la joie resserre leurs liens, cela valait le coup, sans doute...

Mon avis : J'aimerais savoir bien vous parler de ce livre pour vous dire à quel point il m'a bouleversé. Chaque personnage de cette histoire est attachant, chacun à sa manière. Pour résumer, en très gros, ce livre parle des rêves (de vacances), de la famille et de l'amour. Pour vous en dire plus, il parle aussi de la pauvreté, de son injustice, de l'entraide, de l'amitié, des rencontres possibles (dans le train, sur une plage, dans une pizzéria) et du courage. Il ne vous reste plus qu'à le lire ! Bien sûr, l'écriture en est particulière, orale, mais l'on s'y fait très vite et je parie que vous serez enthousiasmés... A essayer !!

Un extrait (Lili, dans le train) : "les gens qui parlent ou qui somnolent ou parfois parlent et puis somnolent et puis reparlent, plus loin, sur deux banquettes en vis-à-vis, on y fête un anniversaire-les bouchons ont sauté-ils ont des gobelets en carton à la main

les portes-documents sur leurs genoux servent de table pour les apéritifs et les petits gâteaux, dans le coeur de Lili on devine un pincement

même s'ils rient pour des choses idiotes-et les femmes aussi fort que les hommes-des allusions vulgaires ou des histoires pleines de sous-entendus, de lit, de tromperies et de petites culottes, il n'empêche qu'on devine un pincement dans le coeur de Lili, on ne rit pas assez chez elle, pas comme là, non, c'est forcé, elle veut dire de bon coeur

et puis elle se met à jouer à l'un de ses jeux préférés, l'un de ses jeux secrets préférés, remettre sur ces corps d'adultes, ces corps bien fatigués, usés, d'adultes, leurs têtes d'enfant, de bébé même si possible ou tout du moins d'enfant, ce qui n'est pas toujours facile

certains ont bien laissé des signes, des traces, et quel que soit leur âge, mais d'autre non, d'autres c'est un mystère, pourtant Lili s'obstine, ne renonce jamais, ceux qui résistent ce sont ses préférés, il arrive qu'elle en manque son arrêt, qu'elle oublie de descendre à sa gare, mais pas cette fois, non"

(puisqu'elle va rencontrer Marc, mais chut !!)

Je vous avais déjà parlé de ce livre dans cet article-ci, ayant assisté à une soirée "hommage" et à une lecture publique, inachevée pour moi (cliquer ici pour en savoir plus sur l'auteur, la soirée à laquelle j'ai assisté et voir des photos. Non, je ne suis pas dessus).

bouton3 Note de lecture : 5/5

29 juin 2008

Matin Brun, Franck Pavloff

MATIN_BRUNMatin brun se situe dans une période trouble, où le régime impose ses lois, strictes. Les scientifiques de l'Etat national ont déclaré qu'il ne fallait plus conserver les chats et les chiens qui n'étaient pas exclusivement de couleur brune, par soucis de rationalisation. Charlie et son ami, notre narrateur, propriétaires d'animaux non réglementaires, s'exécutent et se séparent de leurs compagnons. Puis, ils décident qu'il fait bon vivre, finalement, dans une société qui imposent des règles si rigides, un Etat brun. Au moins, la vie y est légère, et il n'y a plus de questions à se poser...

heart Ce petit livre connaît le succès que l'on sait, mérité. 1 300 000 exemplaires tirés. L'édition 2008 est la vingt-sixième depuis 1998.
Depuis un petit moment indisponible chez l'éditeur, je suis heureuse d'avoir enfin pu me le procurer en librairie.
La fable, imaginée par Franck Pavloff, fait froid dans le dos. Elle nous rappelle, sans y toucher réellement, avec une fausse légèreté, combien il est facile de se laisser bercer par ce qui est insupportable, du moment que cela touche les autres, combien aussi l'être humain peut être  manipulable, lâche et égoiste.
Elle nous rappelle également, bien entendu, d'autres évènements, d'autres "sélections", pas si lointaines.
Une courte nouvelle donc, au prix modique de 1 €, à s'offrir et à offrir tous azimuts, pour réfléchir et se souvenir !!

Un extrait...
"C'est vrai que la surpopulation des chats devenait insupportable, et que d'après ce que les scientifiques de l'Etat national disaient, il valait mieux garder les bruns. Que des bruns. Tous les tests de sélection prouvaient qu'ils s'adaptaient mieux à notre vie citadine, qu'ils avaient des portées peu nombreuses et qu'ils mangaient beaucoup moins. Ma foi, un chat c'est un chat, et comme il fallait bien résoudre le problème d'une façon ou d'une autre, va pour le décret qui instaurait la supression des chats qui n'étaient pas bruns.
Les milices de la ville distribuaient gratuitement des boulettes d'arsenic. Mélangées à la pâtée, elles expédiaient les matous en moins de deux.
Mon coeur s'était serré, puis on oublie vite."

bouton3Note de lecture : 5/5

Le Cheyne éditeur

8 juin 2008

Antigone, Aliette Armel

aliettearmelantigone

Aliette Armel n'écrit pas que des romans...
En collaboration avec d'autres auteurs, elle est également à l'origine de cet ouvrage très intéressant qui traite de la figure mythique qu'est "Antigone".
(Un titre malheureusement épuisé chez l'éditeur mais certainement présent dans beaucoup de bibliothèques.)

Cet essai, inscrit dans la collection "figures mythiques" des éditions "autrement", a le mérite de remettre dans le contexte de chaque époque les différentes versions de la pièce, inventée par Sophocle,...et de donner à comprendre le rôle que sa représentation a pû parfois jouer dans l'histoire avec un grand H, et dans les histoires de chacun, notamment celle de Henry Bauchau (auteur d'une version romancée du mythe).

"Antigone est une création totale, un mythe forgé dans l'imagination de Sophocle puisant dans des légendes ancestrales mais préservant la liberté de notre imaginaire. "Antigone n'a jamais existé, rappelle Jacques Lacarrière, donc, chaque fois qu'on parle d'Antigone, on parle de nous." La richesse de sa personnalité est inépuisable. Elle se révèle, vingt-cinq siècles plus tard, fascinante dans ses contradictions, son énergie adolescente et son attirance pour la mort, sa beauté intérieure dans un physique décrit comme ingrat, son impuissance à accomplir sa féminité, sa droiture inébranlable et sa disparition "sans pleurs, sans parents, sans les chants du mariage." Elle se dresse avec une pureté nouvelle, inspirant terreur et pitié. Elle étonne et subjugue, connue autant qu'Oedipe, mais plus proche et familière que ce père devenu le symbole écrasant du concept central de la psychanalyse."

Quelques Antigones connues - Sophocle, Jean Anouilh, Bertold Brecht, Henry Bauchau, Jean Cocteau, Walter Hasenclever, Charles Maurras et Paul Zumthor...

Qu'elle soit perçue comme lumineuse, rebelle ou simplement humaine, ce personnage d'adolescente frondeuse réveille ce qu'il y a de plus profond en chacun des auteurs qui l'ont côtoyée, quelque chose de vivant, mêlé d'un espoir salvateur et paradoxal...

"Si vous vous réveillez la nuit en récitant une vers d'Antigone particulièrement quand vous êtes déjà un peu vieux, fatigué, et qu'au milieu de la nuit, ça vous réveille, que vous avez ça, que vous le dites et le prononcez, un temps entre le sommeil et la veille, comme il devait être prononcé... ça fait quand même un alexandrin sauvé de sa douleur et de ses insuffisances... Alors, c'est qu'il y a une continuation possible, un avenir."
(Pierre Boutang/George Steiner, Dialogues. Sur le mythe d'Antigone. Sur le sacrifice d'Abraham.)

18 juin 2008

Alberto Manguel

alberto_manguelJe suis en train de lire Journal d'un lecteur d'Alberto Manguel.

Voici quelques extraits glanés au passage...

"Je vais dormir une nuit dans la bibliothèque, afin de m'en approprier véritablement l'espace. C. dit que cela équivaut, pour un chien, à pisser dans les coins."

"Les livres que je prends au lit, le soir, et ceux que je trie dans la bibliothèque durant la journée sont des livres différents. Les premiers m'imposent avant que je m'endorme leur temps et leur longueur, le rythme de narration qui leur est propre ; les autres sont soumis à mes notions personnelles d'ordre et de catégories et m'obéissent presque aveuglément (il arrive qu'ils se révoltent et que je doive les changer de place sur l'étagère)."

29 août 2008

Ecrire

_crire"Une amie qui écrit un roman depuis huit ans craint de le terminer. De version en version, de révision en révision, elle repousse le moment de le remettre à l'éditeur, sachant bien entendu que sitôt qu'il sera imprimé, tout espoir qu'il ressemble au roman qu'elle a en tête s'éteindra et ne lui restera que la réalité d'une création, indépendante de sa volonté et de son désir."

(Extrait de Journal d'un lecteur, Alberto Manguel)

2 novembre 2008

La Ballade de Baby, Heather O'Neill

LA_BALLADE_DE_BABYheart Elle s'appelle Baby. Elle n'a que douze ans. Un père, Jules, encore adolescent et junky, et des chambres meublées miteuses, lui tiennent lieu de foyer. Intelligente et sensible, bonne élève, Baby connaît les pièges des quartiers sombres de Montréal dans lesquels elle traîne. Elle porte un regard tendre et réaliste sur les bandes de gamins qui l'entourent, aime ces adultes en dérive qu'elle contemple tanguer, où ceux plus doux qui l'hébergent un moment. Baby accroche son bonheur aux murs de sa solitude, sait grapiller ici et là des instants de grâce. Elle tombera pourtant, en toute innocence, dans les bras de la "rue"...

J'ai eu un véritable coup de foudre pour ce livre ! Je suis étonnée d'ailleurs qu'il ne s'agisse ici que d'un premier roman tant est maîtrisé, et riche, chez Heather O'Neill, le style, la description et psychologie des personnages, l'univers dans lequel baigne notre jeune héroïne.

Sans trop vouloir m'avancer, voici un auteur de talent qui peut cotoyer sans rougir les plus grands. J'avais envie que cette ballade là ne cesse jamais... Je suis toute disposée à la relire, encore et encore.

Un extrait...
"J'ai couché avec un mec pour cinquante dollars. Ma cousine et moi, on a fait ça dans la rue Ontario. Rien de plus facile. Elle a récolté deux cent dollars en une nuit."
Ne sachant si elle plaisantait ou non, j'ai lâché un bref rire sonore. Ca ne faisait pas le même bruit que d'habitude, on aurait dit que je riais dans une pièce complètement vide. J'étais encore mal à l'aise à l'idée des relations sexuelles. Quand j'ai entendu parler pour la première fois de rouler une pelle, j'ai cru que c'était une chose réservée aux malades mentaux ou, tout au moins, aux gosses qui n'avaient pas réussi à passer au cours moyen.
"Tu veux des détails ?"
Elle a approché son visage du mien, presque à le toucher. Son haleine sentait le tabac et la mort. Soudain, j'ai trouvé quelque chose d'inhumain à cette fille, je me suis dit que, si elle ouvrait la bouche et penchait la tête en arrière, j'apercevrais les rouages du mécanisme interne, un poids suspendu là, par exemple, au lieu des amygdales. Et si elle toussait, en regardant son Kleenex, on verrait des clous et des vis. C'était sûrement pour ça qu'il lui manquait un doigt. Elle avait dû tomber, et le doigt s'était détaché. Tout à coup, je me suis sentie aussi seule que si j'étais le dernier être humain sur toute la planète.
J'ai murmuré que je devais rentrer à la maison, j'ai tourné les talons et je me suis éloignée."

bouton3 Note de lecture : 5/5

Un livre lu dans le cadre du grand prix des lectrices de BOOKPAGES 2009
Catégorie Roman

ISBN 978-2-264-04514-0 - 13 € - 03/2008

Une lecture, trouvée par hasard, chez Pause toujours, auquelle j'adhère complètement. Une autre chez Métro france. Pour ceux qui lisent en anglais, un portrait à lire ici.

heatheroneill

Photo de Kate Hutchinson

Annie a beaucoup aimé aussi
Pour enna, c'est un coup de coeur

25 janvier 2009

Le père de la petite, Marie Sizun

lep_redelapetite"Ton père va rentrer. Ces mots-là. Vivants désormais. Comme une menace."

France est une fillette de quatre ans qui vit seule, dans un appartement parisien, avec sa mère, Li. Au dehors, il y a l'occupation, la guerre. Nous sommes en 1944. Leur douce complicité suffit amplement à "la petite", qui n'a qu'un intérêt mesuré pour cet homme que l'on nomme dans les conversations son "petit papa" et dont la photographie souriante trône sur le buffet. Elle ne le connaît pas, elle ne l'a jamais vu. Ainsi, lorsque ce père, prisonnier de guerre libéré, revient vivre auprès d'elles, tentant d'imposer son autorité, tout est chamboulé...

Je découvre avec ce court roman, qui se déguste d'un trait, l'écriture de Marie Sizun. Et je dois dire que j'ai été séduite.
Le père de la petite est le récit qu'une petite fille devenue grande mène pas à pas. Elle raconte son histoire, ce moment de son enfance, que l'on soupçonne douloureux. L'utilisation de la troisième personne permet à la narratrice de garder les émotions au creux du roman, de les tenir à distance, et cela rend d'autant plus poignant les lignes d'écritures. Il y a du drame familial, des secrets, des conversations derrière les portes, des disputes dont l'enfant, cachée sous la table du salon, tentera de faire un puzzle bancal.
Ce petit livre met le doigt sur ces secrets de famille qui détruisent, sur la place du père, sur ce moment particulier de notre Histoire qu'est la l'occupation et la libération de Paris, et sur le monde enfantin peuplé de rêves et d'incompréhensions. Une bulle d'émotion, à l'écriture fine et sobre !paris_se_lib_re

Un extrait...
"Tout est différent à présent, la petite le voit bien. Maintenant, c'est lui qui commande. Le père. Une autre vie commence, avec de nouvelles règles du jeu.
Ainsi, il y a des choses très simples qu'il est interdit désormais de faire. Par exemple écrire sur les murs, ou dans les livres. Ou chanter. La première fois que, sans y penser, la petite a entonné un de ses chants guerriers d'autrefois, le père a surgi, criant qu'elle lui cassait la tête, lui intimant l'ordre de se taire. La mère, effrayée, est intervenue à son tour, a pris la petite à part, parlant à mi-voix des migraines du père, de sa maladie, expliquant, priant, avec un drôle de visage. La petite, maintenant, se tait. Elle est étonnée, mais elle se tait.
Elle ne comprend pas ce qui se passe. Ne saisit pas ce qu'on veut qu'elle fasse. Ce que veut son père. Elle comprend seulement qu'elle n'est pas comme il faudrait qu'elle soit. Qu'elle dérange. Qu'elle déplaît. Oui, qu'elle déplaît. Et c'est bien la chose la plus difficile à admettre pour celle que sa mère appelait "sa bien aimée"."

bouton3 Note de lecture : 4/5

Arléa - Mai 2208 - 8€

Cette lecture est un livrevoyageur en provenance de chez Liliba, un grand merci à elle !!

La lecture d'arlette, celle d'Anne, celle d'Annie
Sylire a eu la chance de rencontrer Marie Sizun, et c'est par ici

20 avril 2009

Le coeur cousu, Carole Martinez

le_coeur_cousuheart "Ce qui n'a jamais été écrit est féminin"

Frasquita Carasco a reçu, à l'adolescence, et de sa mère, une boîte en bois magique qui la fit couturière et des prières qui la firent un peu sorcière.
Ses dons transmettent aux tissus qu'elle touche une vie particulière. Marié à un homme sans cervelle qui la joue un beau soir pour un combat de coq, elle partira sur les routes avec à sa suite ses filles et son garçon aux cheveux rouges. Fuyant toujours plus au sud, semant derrière elle l'amour et la folie des hommes, elle s'arrêtera finalement dans un village d'Afrique du Nord. Là, son talent de couturière et les sortilèges qui entourent sa famille, trouveront en la dernière née, Soledad, une narratrice, et la main de l'apaisement...

Têtue comme je peux l'être parfois, j'ai lutté bêtement dans les premières pages contre l'envoûtement de ce roman. Je suis quelquefois comme cela, décidée à ne pas me laisser avoir par un livre qui a déjà fait l'unanimité. Mais, peine perdue, ce récit là m'a prise par les sentiments, les émotions et tout le reste. Aucun risque d'y échapper.
Alors oui, Le coeur cousu est un conte dans tout ce que ce genre peut avoir d'irréaliste et de lyrique ; mais non, rien de trop ici, que de la féminité, des corps qui aiment, désirent et souffrent, et de la vie qui avance cahin-caha, sans fioritures ni enjolivements, dans la lutte. Ce livre fait battre le coeur et ne demande au lecteur qu'à se taire, devant tant de simplicité apparente dans le style et devant tant de délicatesse dans la broderie du texte.
Et puis, et puis, j'ai trouvé un peu de l'
Antigone de Bauchau dans l'errance de cette femme, ce qui me l'a rendue encore plus particulière...

Un extrait du cahier de Soledad...
"Il me faut t'écrire pour que tu disparaisses, pour que tout puisse se fondre au désert, pour que nous dormions enfin, immobiles et sereins, sans craindre de perdre de vue ta silhouette déchirée par le vent, le soleil et les pierres du chemin.
O mère, il me faut ramener des profondeurs un monde enseveli pour y glisser ton nom, ton visage, ton parfum, pour y perdre l'aiguille et oublier ce baiser, tant espéré, que jamais tu ne m'as donné !
Il me faut te tuer pour parvenir à mourir...enfin.
Mon lumineux cahier sera la grande fenêtre par où s'échapperont un à un les monstres qui nous hantent.
Au désert !"

bouton3 Note de lecture : 5/5

ISBN 978 2 07 078305 2 -23€ - 02/07

broderie

Ce titre voyage en grand format grâce à Florinette, merci !! - La lecture de Sylvie - Celle de Dda chez Biblioblog - Celle de Clarabel - Ici, l'auteure reçoit avec surprise et émotion un prix pour ce roman - Pour Sylire c'est un coup de coeur - Leiloona crie au génie - Bellesahi l'a dégusté - Pour Amanda, il est juste superbe - La fiche de lecture du CNL - Pour Gambadou, c'est un coup au coeur aussi - Bel Gazou a ressenti un peu d'effroi - Et Aifelle a salué cet hommage aux femmes... (désolée pour les avis que j'oublie !)

29 juin 2009

L'année brouillard, Michelle Richmond

l_ann_ebrouillard"La seule chose dont je sois certaine, c'est que j'ai perdu Emma et que je dois la retrouver. La seule issue acceptable est la suivante : Emma, de retour à la maison, indemne. Mais tout ce qui conduit à cette issue recherchée, les étapes déterminantes par lesquelles je dois passer pour y arriver demeurent pour moi un mystère."

Abby, photographe, se promène avec Emma, six ans, sur une plage de San Francisco, Ocean Beach. Emma est la fille de l'homme qu'Abby aime et qu'elle doit épouser dans quelques semaines, Jake. Abby est heureuse parce qu'elle sent qu'ils forment déjà, à eux trois, une famille, que la petite commence à l'aimer un peu. Emma plonge ses mains dans le sable, à la recherche de coquillages tandis qu'Abby promène son regard de photographe sur la plage.
A un moment donné, elle détourne son regard de l'enfant pour observer le cadavre d'un bébé phoque. Oh à peine quelques secondes. Mais lorsque ses yeux balayent de nouveau la plage à la recherche de la silhouette familière, la fillette a disparu. Où est Emma ? Avec ténacité, et malgré les découragements de son entourage, Abby ne cessera de chercher, de creuser sa mémoire, et de tenter de réparer...

heart Me voici encore aujourd'hui sur ce blog avec un livre "coup de coeur", un livre dans lequel je me suis plongée avidement... Et pourtant, il s'agissait ici de se confronter avec cette peur ancestrale qu'est celle de la perte d'un enfant. Quand cette enfant a de plus le même prénom que la sienne, l'angoisse est décuplée et la lecture un peu masochiste. Mais j'ai bien fait, vraiment, de me faire un peu peur. J'ai pris énormément de plaisir à cotoyer Abby, à parcourir avec elle longuement Ocean Beach, à la recherche d'indices. J'ai aimé sa manière de voir le monde, ses remises en question, sa certitude absolue qu'elle allait retrouver l'enfant, la ramener à son père, vivante. Une lecture toute en émotion, à fleur de peau, qui crée des échos en soi, de toutes sortes, malgré soi. N'est-ce pas, réellement, tout ce que l'on demande à un livre ?
Ah oui - aussi - voici une lecture pendant laquelle je me suis dit, voilà comment j'aimerais écrire, exactement, et ce n'est pas si courant. Je salue donc aussi la traduction de Sophie Aslanides, qui y est sans doute pour quelque chose.

"Je veux qu'elle revienne, et le désir crée la substance à partir de rien. Je me souviens du moment où j'ai contourné le mur de béton, certaine de la trouver là. Je le voulais tellement que j'ai construit une image, et cette image était frémissante de vie : Emma accroupie, en train d'attendre derrière le mur, le seau jaune calé entre ses genoux. Quand je suis arrivée et que je n'ai pas trouvée Emma, j'ai senti la réalité me frapper comme un coup de fouet en plein visage, et, avec elle, une terreur si intense qu'elle me fit plier en deux, l'estomac retourné."

bouton3 Note de lecture : 5/5

ISBN 978 2 283 02363 1 - 25€ - AVRIL 2009

livres, critiques citations et bibliothèques en ligne sur Babelio.com

D'autres lectures...
Clarabel l'a trouvé bougrement scotchant - Kathel (lettres expres) a eu un coup au coeur - Cuné ne l'oubliera pas de sitôt - Cathulu a beaucoup aimé aussi, cette réflexion sur le temps et la mémoire...

7 juillet 2009

De l'enfance et de la violence

banc_cole"Nell était isolée. Personne n'osait marcher à ses côtés pour aller à l'école ou rentrer. Bien trop risqué. Sa trousse était régulièrement pillée. On épinglait des mots sur le dos de son cardigan d'école. On brisait si souvent son thermos qu'Agnès a fini par lui donner une bouteille de lait en plastique tous les matins. On ne perdait pas une occasion de lui enfoncer la tête dans les toilettes infectes de la cour. [...]
Les élèves étaient grisées par leur propre cruauté, à la fois révoltées et fascinées de découvrir jusqu'où elles étaient prêtes à aller. Nell était la victime parfaite : elle se plaignait rarement, endurait tout tête baissée, acceptait leurs excès comme s'ils n'étaient que son dû. Elle a appris à pleurer juste au bon moment, quand leur soif était assez étanchée pour se calmer quelques temps. Elle a appris à se fondre dans les murs de la cour pour ne pas se faire remarquer ni attirer de vexations. Elle a appris des jeux auxquels elle pouvait jouer dans sa tête tout en gardant en permanence un visage de marbre. Elle a appris à se faufiler comme un animal apeuré, à se glisser dans et hors de l'ombre, à tirer les heures interminables de la récréation en marchant à grands pas silencieux derrière la tôle ondulée rouillée de l'abri.[...]
Durant toutes ces années de brimades, Nell n'a rien dit à sa mère. Agnès avait des soupçons, bien sûr. Comment n'en aurait-elle pas eu quand sa fille rentrait tous les jours couvertes de bleus, mais sans camarade qui puisse en être l'auteur ? Nell a hésité une ou deux fois, mais n'a pas pu se résoudre à se confier à sa mère. C'était comme une peau sombre et palpitante sous son épiderme. Elle sentait qu'elle serait physiquement malade si elle tentait d'en parler. Comment aurait-elle pu dire à une mère dévastée par la perte de son enfant de lumière que tout le monde haïssait le terne petit oiseau qui lui restait ? Non, cette pensée était trop proche de son coeur, trop proche pour être formulée ou, même, pour lui tirer des larmes."

Extrait de Pierres de mémoire de Kate O'Riordan

20 juillet 2009

"Je lui ai dit :

"Je t'aime", les yeu_clabousserx dans les yeux, on rêve... Je rêve !... Mais qu'est-ce qui me prend ?
Je ne lui ferai pas porter les valises qu'il n'aura pas à porter. Je voyage léger. J'ai fait le tri. Mes demandes ne seront pas celles d'une petite fille. Non pas parce que je ne l'écoute plus, mais parce qu'après lui avoir rendu la parole à cette petite fille, après l'avoir longuement écoutée, après avoir dialogué avec elle, nous sommes tombés d'accord elle et moi pour laisser vivre à l'adulte que je suis devenue une jolie histoire d'amour sans l'ombre des blessures, des carences survenues pendant l'enfance.
Ensemble, nous avons repéré les coups reçus et établi une sorte de carte. Je l'ai consolée et j'ai poursuivi le chemin après lui avoir certifié qu'elle n'avait pas résisté pour rien, promis que ma vie de grande personne serait à la hauteur de l'ambition et du courage dont elle avait fait preuve.
C'est ainsi que, depuis un certain temps, je marche dans la vie, façon poupées russes, avec, à l'intérieur de moi, de petits personnages qui changent de taille et quelquefois de couleur, animée de l'exigence d'une petite fille formidable à qui j'ai fait une promesse."

Extrait de Vue sur mer, Annie Lemoine

16 mars 2009

Stage d'écriture (suiteetfin)

cabane_oiseauxAllez, après une petite pause bien méritée, terminons en avec notre fil conducteur de la semaine précédente, toujours sur le thème des animaux.

Après nous avoir lu un extrait de Le Terrier de Kafka, Olivia Rosenthal nous a demandé de travailler sur cette question Où habitez-vous ?, en se mettant toujours dans la peau d'un animal...j'ai choisi, pour ma part, d'habiter une cabane à oiseaux.

"Cabane à oiseaux perchée sur une colline, mon abri est aussi un refuge, entouré d'autre refuges semblables, colonie d'habitations serrées les unes contre les autres. Je m'y sens bien. Je profite du jardin et des plantes qui l'entourent, du calme et de la lumière. Je sais qu'une fois glissé à l'intérieur, personne ne me voit. Mais moi, je vois tout. Mon abri est beau, coloré, fait de bois et de clous neufs. Il est élégant. C'est ce que j'aime aussi dans mon refuge, qu'on le regarde, qu'on le trouve beau, mais qu'il m'appartienne. J'aime qu'il sache me préserver, préserver ma nichée. De mon abri, parfois je m'envole, certaine d'y revenir, le plus souvent possible, sûre de le retrouver là, à sa place, parmi ses congénères."

© Les écrits d'Antigone - 2009
Un texte écrit dans le cadre d'un stage d'écriture animé par Olivia Rosenthal.

(photographie http://www.espritcabane.com/recup/maison-oiseaux.php)

Merci pour votre patience, votre gentillesse et vos lectures ! Comme vous l'avez sans doute remarqué, mes textes ont été de plus en plus courts...et de moins en moins inspirés, ouf tout cela n'était pas facile, je suis ressortie de cet atelier rincée !!

23 juin 2009

Ecrire...

je_pr_f_re__crire"J'ai toujours eu un peu de mal à parler et à dire le fond de ma pensée. Je préfère écrire. Il me semble alors que les mots deviennent très dociles, à venir me manger dans la main comme des petits oiseaux, et j'en fais presque ce que j'en veux, tandis que lorsque j'essaie de les assembler dans l'air, ils se dérobent."

Phrase extraite de Le rapport de Brodeck de Philippe Claudel, qui est curieusement pour moi un abandon de lecture...je n'ai pas réussi à dépasser les 50 premières pages, à m'intéresser à l'histoire, je n'ai pas insisté, étrange, dommage.

15 août 2009

La liane du désir, Chitra Banerjee Divakaruni

lianedud_sir"Le jour où Sudha descendit d'avion pour se jeter dans les bras d'Anju, laissant derrière elle, en Inde, les décombres de son mariage, leur vie à toutes deux fut à jamais changée. Et pas seulement la leur. Celle de Sunil aussi. Et celle de la petite Dayita. Comme des ondes sonores invisibles, les changements se propagèrent de proche en proche, pour finir par atteindre l'Inde et Ashok, qui sur son balcon attendait que le vent tourne. Et par bousculer les mères, dans leurs appartement aux murs rectilignes, bouleversant l'équilibre de la maison-née, ce qui eut pour résultat la fermentation exagérée des pickles de mangue et la production par le goyavier du jardin de fruits roses d'une grosseur inhabituelle. Les changements se multiplièrent à la façon de lianes dans les contes de fées, leurs vrilles rampant jusqu'à des personnes dont Sudha et Anju ne connaissaient même pas le nom.
Ces changements étaient-ils bons ou mauvais ?"

heart La Liane du désir est un deuxième tome, le premier tome, Ma soeur, mon amour (lu il y a quelques temps déjà, me voici en rattrapage de PAL !), avait déjà été un coup de coeur pour moi, c'est également le cas pour le second. Je craignais que cette suite ne me déçoive, comme c'est souvent le cas pour les suites...mais non, pas du tout, ce second opus, bien que différent du premier, est de grande qualité.
Je n'ai eu aucun mal à me souvenir des personnages (l'auteure nous réserve quelques résumés des épisodes précédents bien utiles) et j'ai aimé les retrouver. Anju mariée à Sunil, "installée en Amérique", enceinte, invite Sudha, sa soeur, à venir la rejoindre, après son divorce et la naissance de sa fille Dayita. Mais, car il y a un "mais" Anju perd son enfant et c'est compter sans le désir que Sunil ressent depuis toujours pour Sudha et qu'il lui a avoué en Inde, avant son départ.
Chitra Banerjee Divakaruni nous conte par le biais de ce ménage à trois forcément explosif, les limites du "rêve américain", les fêlures de l'exil, mais également les pièges du sentiment amoureux ou du désir. Comme souvent dans ses écrits, est mise en avant l'idée que, solitaire, la femme indienne peut enfin puiser en elle la force et la lucidité nécessaire à la poursuite de son bonheur, un bonheur qui ne passe pas forcément par l'amour ou le mariage mais dont la culture originelle n'est pas exclue.
Les diverses focalisations du récit apportent à cet écrit une force particulière qui m'a beaucoup touchée. Les émotions sont traduites de manière très fine. Vraiment, un très beau moment de lecture, et une sacrée leçon d'écriture, que je vous recommande.

"La femme au sol ouvre les bras à celle qui était dans le ciel. Voilà ce que nous faisons du chagrin. Les morts sont des goutelettes d'eau de mer et de cendre, qui voyagent dans l'air. Montent-elles ? Tombent-elles ? Regardez, il n'y a pas de différence. La courbe de la terre ressemble à un sourire."

bouton3  Note de lecture : 5/5

La lecture de Bel Gazou

A lire aussi : La maîtresse des épices, Mariage arrangé,...

30 août 2009

Une année étrangère, Brigitte Giraud (Rentrée littéraire 2009)

une_ann_e__trang_re"Il faut que j'aie des antennes, que je sois double en permanence, à l'affût du moindre signe, du moindre indice.
Mais ce qui complique la donne est que la fille au pair n'est pas une fille dans une simple situation de travail. On attend d'elle un service rendu mais aussi une présence particulière, une façon d'être, la construction d'un lien, on attend d'elle qu'elle donne de son temps, de sa patience, de son énergie, comme le ferait une grande soeur éternellement bien disposée. On attend d'elle qu'elle mette en scène la touche d'exotisme qui fait la différence, celle pour quoi on l'a choisie et qui valorise la famille par sa présence "si particulière", par son style français inimitable, qu'elle même ignore évidemment."

heart Nous sommes dans les années 80, à l'ère de Cure, des cassettes audio, du Mark fort et des mobylettes. Laura a dix-sept ans, et pour fuir une ambiance familiale tendue, la jeune française décide de partir en Allemagne comme jeune-fille au pair. Elle arrive chez les Bergen, un couple et deux enfants, qui semblent vivre sans se soucier du temps qui passe, des tâches à accomplir, ou de lui signifier quel est véritablement son rôle...

Je suis (du verbe suivre) Brigitte Giraud depuis quelques temps déjà, fascinée par mes précédentes lectures (La Chambre des parents, J'apprends ou L'amour est très surestimé). Ce titre là, dont je n'attendais pas grand chose, m'a d'emblée séduite et ce dès les premières pages. Je suis donc heureuse de mon choix en cette rentrée littéraire, et de ma lecture !!

Qui s'est déjà retrouvée dans cette situation là, intégrer un foyer pour s'occuper d'enfants, dormir chez cette famille, y passer tout son temps, saura que l'auteure a su trouver les mots qu'il faut pour décrire au mieux la gêne, l'adaptation nécessaire, l'extrême acuité que cela suppose dans les premiers temps, barrage de la langue existant - ou pas, et la transformation de soi que cela implique aussi, inévitablement.

J'ai beaucoup aimé ici l'écriture, la description de journées longues comme un puits sans fond, ce petit rythme qui se met doucement en place, les rapprochements affectifs qui se nouent et se dénouent. J'ai aimé le personnage de Laura, terriblement attachante avec sa coiffure en pétard, ses découvertes littéraires tendancieuses et sa manière d'être si mûre et si fragile à la fois.

Dans une ambiance qui peut sembler morose, mais qui permet à Laura de comprendre qui elle est, ce roman poursuit une route "en quête de soi" au charme certain. Et j'ai été charmée.

"Mon empressement et mon application n'apportent rien à cette famille hors du commun. J'ai voulu être irréprochable, disponible et parfaite, toujours prête à me charger d'une corvée, à me rendre utile, malgré la sensation que j'avais de m'éloigner de moi. Je préférais nettoyer le four ou promener le chien plutôt que me confronter à ma vacuité. A vrai dire, je ne sais ce que je préfère, me rapprocher de moi avec le risque de me trouver, de supporter le vrai visage de ma solitude, ou m'inventer un double, brave soldat toujours prêt à exécuter les ordres, soumis et vigilant, un être qu'on utilise, qu'on épuise et qu'on oublie."

bouton3 Note de lecture : 5/5

ISBN 978 2 234 06346 4 - 17€ - Août 09

Clarabel l'a lu aussi - Un autre billet par ici et un blog à découvrir, au passage

Défi 1% littéraire 2009 : 3/7

28 décembre 2009

L'Ombre du vent, Carlos Ruiz Zafon

l_ombre_du_vent"- Eh bien, il s'agit d'une histoire de livres.
- De livres ?
- De livres maudits, de l'homme qui les a écrits, d'un personnage qui s'est échappé des pages d'un roman pour le brûler, d'une trahison et d'une amitié perdue. Une histoire d'amour, de haine et de rêves qui vivent dans l'ombre du vent.
- Tu parles comme la couverture d'un roman de gare Daniel.
- Ça doit être parce que je travaille dans une librairie et que j'en ai trop vu défiler. Mais cette histoire-là est réelle. Aussi vraie que le pain qu'on nous a servi a au moins trois jours. Et comme toutes les histoires réelles, elle commence et finit dans un cimetière, encore qu'il ne s'agisse pas du genre de cimetière que tu imagines."

Un matin, un père emmène son fils vers un lieu secret, caché au fin fond d'une Barcelone tortueuse, le Cimetière des livres oubliés. Il s'agit d'effectuer une sorte de rituel. L'enfant devra y choisir un ouvrage, en prendre soin tout au long de sa vie, et conserver le silence sur l'endroit étrange dans lequel il l'a trouvé. Daniel Sempere choisit un volume au titre évocateur L'Ombre du vent, d'un certain Julian Carax. Sans le savoir, il vient d'emporter avec lui l'objet qui va décider de son avenir et en bouleverser les contours...

heartVous êtes déjà nombreux à être rentrés dans ce roman, vous comprendrez donc aisément l'effet qu'il a pu produire sur la lectrice et l'amoureuse des livres que je suis. A peine y avais-je glissé un oeil, une attention, ma lecture, que j'ai été aspirée par une intrigue captivante telle que plus rien d'autre n'avait soudain d'importance à mes yeux... Il fallait que je sache ce qu'il était advenu de Julian et ce qui allait advenir de Daniel, peu importe la qualité de l'écriture, la musique des phrases ou le nombre de pages. M'est revenu en fait, et encore une fois, avec ce récit le plaisir que l'on me raconte des histoires, et ce n'est pas rien.
Intrigues, policiers sanguinaires, belles jeunes filles éthérées, librairies labyrinthiques, mystères, secrets et autres ingrédients efficaces sont largement distillés dans ce roman dans lequel je vous recommande chaudement de plonger - si ce n'est encore déjà fait - à votre tour. Je vous prédis un voyage décoiffant. Une lecture idéale pour ces quelques journées de vacances... Pfiou.

"Je n'avais jamais entendu mentionner ce titre ni son auteur, mais cela n'avait pas d'importance. La décision était prise. Des deux côtés. Je pris le livre avec les plus grandes précautions et le feuilletai, en faisant voleter les pages. Libéré de sa geôle, il laissa échapper un nuage de poussière dorée. Satisfait de mon choix, je rebroussai chemin dans le labyrinthe, le volume sous le bras, le sourire aux lèvres. Peut-être avais-je été ensorcelé par l'atmosphère magique du lieu, mais j'avais la certitude que ce livre m'avait attendu pendant des années, probablement bien avant ma naissance."

bouton3 Note de lecture : 5/5 - Le Livre de poche - 978 2 253 11486 4

Un grand merci à qui me l'a gentiment offert ! J'ai mis du temps à l'ouvrir enfin...objectif_pal

Quelques lectures parmi d'autres ~ Chez Biblioblog - et chez Blog-O-Book -

Objectif Pal : 6/50

9 février 2010

Frère...

parapluie...ou père, celui que je cherche, que tu n'es pas.
Ce rôle dans lequel je te voudrais.
Pour réparer, sans doute.
Loin de ce manque qui me détruit toujours.
En finit-on un jour avec les maux de l'enfance ?
En finirai-je enfin de construire, de détricoter,
De choisir des textures inconnues pour refaire mon ouvrage ?
Recommencer, mieux.
Je ne me remets pas de leur manque d'amour.
Je ne me remets pas de l'absence, de sa distance. Tu le sais bien.
De ces bras, jamais, autour de mon corps.
Protection. Un parapluie au-dessus de ma tête.
Tu souris. Tu penses au soleil, aussi.
La confiance, en soi. Pour soi et pour les autres.
Pour donner. Et reprendre, un peu,
Si l'on veut bien.
De temps en temps. Parfois.

Frère ou père, est-ce ainsi donc que je t'aime ?
Pour nulle autre raison ? Parce que tu lui ressembles ?

Ce serait un jeu bien cruel que d'ôter ton masque à présent,
Alors que ma quête m'amène fatiguée à tes pieds.
Dans le lieu même que je voulais quitter, hier.

Ce serait un jeu bien sournois que de me troubler,
Alors même que je me retrouve de nouveau face à toi.

© Les écrits d'Antigone - 2010

Merci de ne pas chercher à démêler  le vrai, du faux. Il y a de l'influence de "Sous l'Oeil d'Oedipe" là-dessous...et puis des phrases, des réflexions...du jeu d'écriture.

19 janvier 2010

L'Absence d'oiseaux d'eau, Emmanuelle Pagano

l_absenced_oiseauxd_eau"C'est vrai, c'est notre maison ici. Le seul lieu où l'on est vraiment ensemble, toi et moi, qui nous appartient, c'est ici.
Cette maison, ce livre, nous l'habitons ensemble, et ce que nous faisons dedans, c'est elle-même. Nous la construisons, nous l'aménageons, petit à petit, lettre par lettre. Quand elle sera finie, nous l'habiterons, nous l'habiterons ensemble, mais ce sera le seul endroit où nous pourrons nous tenir tous les deux."

heart Mais comment Emmanuelle Pagano fait-elle donc pour encore une fois être là parfaite, avec cette écriture dans laquelle on ne pensait pas la retrouver si émouvante, si prenante, si forte ?

J'étais pourtant dubitative face à l'exercice de style annoncé, un échange de correspondance entre deux écrivains, une oeuvre de fiction dans laquelle ils auraient inventé qu'ils s'aimaient. L'un a quitté l'histoire, a repris ses lettres, brutalement, ne laissant que ses vides, son absence. Je craignais le sentiment de détachement, ou pire une déception.

C'était compter sans le talent d'Emmanuelle Pagano, son aptitude à parler du quotidien, des enfants, des êtres.
La lecture de ce récit à une voix, qui se mêle malgré tout à celle de l'autre en creux, questionne profondément sur la place de l'écriture dans la vie d'une femme, mère de famille, épouse, amoureuse. Elle ne pouvait me laisser indifférente.
J'ai noté également la faculté accrue de l'écrivain de parler des corps qui se cherchent, se trouvent et se manquent, et ce avec un naturel désarmant, sans tabou. La métaphore trouvée, utilisée, est celle de la rivière, de l'eau et du lit qui la contient, elle parcourt le récit et en façonne la trame. Et tout cela est beau, car ce texte est définitivement composé de poésie. Il nous remplit, nous émerveille et nous chamboule un peu. Il raconte la vie, la vraie, celle qui nous laisse parfois aussi sur le côté avec nos choix et nos défaites. Une vie faite de matière, de cellules humaines et de sentiments. Et rien ne nous est caché, tu. Le réel peut alors sembler cru, je l'ai trouvé moi magnifique.

En fait, à ce stade de mon billet, j'ai simplement envie de remercier l'auteure du don d'elle-même qu'elle nous fait dans ce livre, et je vous cite en dessous quelques extraits...parce que je ne sais comment parler mieux d'Absence d'oiseaux d'eau...

"Tu sais, ce que je ressens pour toi n'est pas venu comme ça d'un coup, même s'il y a eu un moment de bascule dans les lettres, c'est venu petit à petit, très vite, mais petit à petit, ça n'a jamais cessé de progresser, comme les enfants grandissent, millimètre par millimètre, on ne s'en rend pas compte, et puis soudain, les enfants sont plus grands que soi. Maintenant, mon amour pour toi est comme ça, il me dépasse. Rien à voir avec les grandes pluies qui emportent la rivière en quelques minutes. Je me suis noyée tellement peu à peu que je ne m'en suis pas aperçue. Mais lorsque j'ai ouvert la bouche, elle s'est remplie d'eau."

"Pourquoi j'écris ? Parce qu'écrire m'est indispensable pour vivre, le bonheur comme le malheur.
En ce moment précis, depuis trois mois, j'écris parce que tu me manques, j'écris pour te séduire, pour te garder, pour que tu sois et restes amoureux de moi. Je ne veux pas que tu me quittes. Alors j'écris. Je sais que mes mots ont un pouvoir sur toi, je l'utilise, peut-être même que j'en abuse.
Je t'embrasse."

bouton3 Note de lecture : 5/5

ISBN 978 2 84682 447 7 - 18€ - 01/2010

- Des liens de lectures sur le blog de l'auteure Mes lectures de ses autres romans -

8 février 2010

Manteau de neige, Craig Thompson

blankets4"Je voulais le ciel.
Et j'ai grandi en m'efforçant d'obtenir de ce monde...
un monde éternel."

C'est l'histoire d'un premier amour qui nous est conté dans la BD dont je vous parle aujourd'hui, mais ce n'est pas que cela. Manteau de neige évoque tout d'abord l'enfance d'un petit garçon nommé Craig (l'auteur), une enfance vécue dans la crainte de Dieu, une enfance dure où les grandes personnes enferment les enfants capricieux dans des cagibis, en veulent à leur corps, une enfance ou même la nuit ne permet pas la fuite car il y a ce petit frère remuant avec qui Craig partage un lit forcément trop étroit. Une impression si forte d'être différent, anormal, seul.
Plus tard, il y a heureusement cette rencontre avec une jeune fille, Raina, sous le biais d'une "classe de neige paroissiale", l'amour qui nait et le départ vers la famille de la jeune fille, une semaine de vacances partagée entre pudeur, découverte de l'autre, des autres, différents. La vie tout simplement avec ses doutes, ses questionnements, et ses non-réponses.
La tentation de suivre enfin, après la déception, cette voie que la paresse de chercher plus loin dicte, la tentation de croire à une vocation qui n'existe pas.

manteaudeneigeDe cet album, j'ai aimé la fluidité des dessins, l'aspiration des planches qui nous entraîne à tourner les pages de plus en plus vite vers la fin. J'ai aimé également la voix singulière qui s'échappe des vignettes mais qui reste universelle. Qui n'a pas connu cet émoi des premiers amours ? La distance entre des émotions de jeune adulte et cette réalité de n'être encore que de grands enfants, devant rendre des comptes.
Et puis, il y a cette évocation, très forte et poignante, du rigorisme religieux qu'à subit enfant l'auteur né dans le Winsconsin, au sein même d'une amérique extrêmement puritaine. Etre ainsi menacé des flammes de l'enfer, évoquer le diable avec des éclairs dans les yeux, puis le ciel avec des étoiles, façonner ainsi dans la crainte de jeunes esprits...voilà qui m'a remuée plus qu'il ne faudrait.

Ce gros volume, en forme d'autobiographie, va conserver une place de choix dans ma bibliothèque et m'inciter à fouiner plus sérieusement dans cette collection de chez Casterman.

Merci Bel Gazou !!

Casterman (2004)

1 octobre 2009

Ecoute s'il neige, Cathie Barreau

_coutes_ilneige"Ses yeux n'étaient pas clos. Ils étaient d'un bleu très pâle, éteint comme une pierre, une aigue-marine abandonnée. Ses paupières restaient immobiles et son sourire s'attachait à sa bouche, ses pommettes, son front. Le contact de ses mains fut si sensible que le souvenir ne me quitta pas. Quand ils me souhaitèrent le bonsoir et que je me décidai à entrer dans le jardin de nos hôtes, j'étais dans un rêve dont je ne distinguai pas la cause exacte : était-ce ma solitude soudain rompue ou la rencontre avec mes voisins, avec elle si belle, au regard absent ?"

heart Voici un coup au coeur qui m'a prise par surprise. Comme quoi, fureter dans sa PAL a parfois du bon...mais ce titre n'est pas si vieux, loin sans faut.

L'histoire ? Paul emménage dans une maison, au coeur d'un hameau, à présent seul, suite à un divorce dont il se remet doucement. Il cherche le calme et la tranquillité ; il espère se retrouver face à lui-même. Mais un matin, une femme apparaît à la fenêtre, chez ses voisins, nue, le buste offert au soleil, apparemment impudique.  Cette femme s'appelle Blanche et elle ne voit pas. Par le toucher et les sensations, un dialogue se noue entre ces deux âmes, tissant au fil des rencontres une relation amoureuse peu ordinaire.

Il est assez rare de lire un roman en ayant déjà entendu et vu l'auteure. Cathie Barreau a en effet dirigé pendant de nombreuses années le lieu de littérature dans lequel je me rends souvent, dans ma ville. Dans les premières pages de ma lecture, c'est donc une voix féminine que j'ai entendu, brouillant un peu les pistes, et puis la transposition s'est faite, le souvenir de sa dédicace, de ce qu'elle m'a dit, s'être mis ici aisément dans la peau d'un homme. Et l'émotion est venue, ensuite, de manière inattendue, dans ce rapport tactile peut-être entre deux êtres, dans tout ce que j'ai ressenti de connivence avec les personnages, dans ce rapport aussi avec la nature et les autres, dans cette facilité de lecture qui pour une fois et pour ce roman est un compliment.

bouton3 Note de lecture : 5/5 (le maximum, forcément, pour cause de frissons !)

ISBN 978 2 916010 37 3 - 15€ - AVRIL 2009

Les autres titres lus ... Trois jardins (2006) - Journal secret de Natalia Gontcharova (2006) - Visites aux vivants (2007), avec une préférence nette pour les deux derniers (mes billets ont disparu avec mon ancien blog).

objectif_palUn extrait différent sur remue.net - Une très jolie critique sur le blog des habitants de St Nazaire - et un élan d'admiration chez Poézibao -

Défi Objectif Pal : 3/50

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